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Dans les diagonales du temps
9 mars 2020

Les photographies de Hugo Simberg pour sa peinture

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9 mars 2020

VRATA RAJA ou GATES TO PARADISE (LA CROISADE MAUDITE), un film d'Andrzej Wajda

VRATA RAJA ou GATES TO PARADISE (LA CROISADE MAUDITE)
VRATA RAJA ou GATES TO PARADISE (LA CROISADE MAUDITE)
VRATA RAJA ou GATES TO PARADISE (LA CROISADE MAUDITE)


Fiche technique :

 
Avec John Fordyce, Ferdy Mayne, Matthieu Carrière, Lionel Stander, Pauline Challoner, Denis Gilmore, Jenny Agutter et les enfants de l’école primaire Savo Pejanovic de Titograd.

 

Réalisateur : Andrzej Wajda. Scenario : Jerzy Andrezewski & Donald Kravanth. Images : Meczyslaw Jahod. Son : Pierre Pamier & Kevin Connor. Directeur artistique : Miomir Denic. Musique : Waro Swingle.


Pologne- Grande Bretagne, 1967, Durée 78 mn. 

 
Résumé :

 
En 1212, un jeune berger, Jacques de Cloys (John Fordyce, d’une beauté et d’une blondeur à damner un saint. Né en 1950, il n’aurait tourné que ce film) au charisme indéniable, prêche une nouvelle croisade sur la foi d’une vision qu’il prétend avoir eue. Il décide que, là où les croisades précédentes ont échoué, une autre menée avec l’innocence et la pureté des enfants réussirait. Des milliers d’enfants et d’adolescents quittent leurs villages en entendant l’appel de Jacques et partent pour libérer le tombeau du Christ du joug des infidèles. Un moine franciscain, ancien chevalier croisé (Lionel Stander), est chargé de la direction spirituelle des enfants qu’il entend en confession le long de la route. Le monologue du moine alterne avec les confessions des enfants qui lui apprennent que la vraie nature de leur enthousiasme est homosexuelle. Très vite, il lui sera aussi révélé que l’inspiration de Jacques vient d’un homme dont il a été amoureux, le comte Ludovic (Ferdy Mayne, 1916-1998, un pilier de la Hammer qui a tourné une multitude de films tant pour le cinéma que pour la télévision), un seigneur homosexuel qui a abusé de la naïveté de Jacques. En fait, si les enfants suivent Jacques, c’est plus pour des raisons amoureuses que religieuses. Ils prennent au pied de la lettre la fameuse phrase : « Aimez-vous les uns les autres ». Bientôt le comte Ludovic est très épris d’Alexis (Matthieu Carrière), l’un des adolescents de la croisade, qu’il a recueilli et dont il a fait son fils et son amant... Le moine tente désespérément d’arrêter la marche des enfants. En vain, c’est la mort et l’esclavage qui les attendent.

 

 


L’avis critique

 
Le film est l’adaptation assez fidèle du roman de Jerzy Andrezewski, Les Portes du paradis,paru en France en 1961 aux éditions Gallimard. Jerzy Andrezewski qui a participé à l’adaptation de son livre, est un écrivain catholique homosexuel qui s’est rallié au régime communiste, puis est passé à la dissidence après l’intervention des troupes du Pacte de Varsovie à Prague, en août 1968. Il devient un ardent défenseur des droits de l’homme. Le roman est inspiré de faits historiques, c’est d’ailleurs plus un poème d’une centaine de pages qu’un roman.
À l’image du roman, le film est d’un seul mouvement, la marche des jeunes croisés vers Jérusalem. De longs et incessants travellings décrivent et accompagnent la marche des enfants. L’utilisation systématique de ces travellings en plan large, où le blanc domine dans un Technicolor souvent surexposé, procure une sorte d’hypnose dont le spectateur est périodiquement sorti par des gros plans sur de sublimes visages. Le montage fait alterner la foule, un peu chiche tout de même pour figurer cette levée en masse de la jeunesse d’occident, en plan très large et quelques groupes en plan moyen qui ainsi, s’en distinguent. Quatre adolescents s’en détachent. Chacun racontera son histoire par le truchement de la confession au moine qui accompagne la croisade, pas toujours joué dans la finesse par Lionel Stander, vieux routier des plateaux américains. Ces confessions rendent le film très bavard et paradoxalement assez théâtral alors qu’il est tourné presque exclusivement en extérieur. Quatre récits traités en plan-séquence, coupés et illustrés à l’aide de retours en arrière qui ne parviennent néanmoins pas à rompre complètement la monotonie du film ; il faut d’ailleurs attendre la trentième minute pour que ceux-ci arrivent. Si le décor est superbe, une vaste plaine rocailleuse bordée de montagnes violines, le réalisateur n’en change pratiquement pas, d’où l’impression que nos croisés font du surplace un peu à la manière des deux zigotos (Jean Rochefort et Bernard Fresson) du film très recommandable de Fabio Carpi, Les Chiens de Jérusalem, qui avaient décidé qu’il était tout aussi profitable pour leur âme de faire le tour de leur château pendant un an plutôt que d’entreprendre le voyage fort périlleux vers la terre sainte. Pourtant, habilement, Wajda varie les optiques avec une prédilection pour les longues focales qui isolent les protagonistes lors de leurs dialogues, réduisant les figurants à des silhouettes floues. Des recoupements d’images permettent aux récits successifs de s’emboîter sans pour autant se recouvrir. Et finalement, sur le plan de l’espace comme sur celui du temps, de s’assembler, de se souder comme les élément d’un puzzle.
Wajda a cherché des équivalences au texte poétique, d’une part en entrelaçant le présent de la croisade avec les souvenirs des jeunes garçons, ces séquences sont plus poétiques que narratives ; d’autre part en balayant la pérégrination des adolescents par ces longs et lents travellings, images très picturales proches de celles que faisaient à la même époque Miklos Jancso dans Rouges et blancs (DVD édité par Clavis) par exemple. Beauté des adolescents, beauté aussi de leurs vêtements conçus sans le moindre souci historique, des hardes qui ne sont pas vraiment des loques, mais plutôt des costumes assez simplifiés comme des costumes de théâtre avec le souci qu’ils soient signifiants, dans des tons clairs et lumineux pour les jeunes, sombres pour les adultes.

 

(c)  Renata Pajchel

La mine des deux garçons tenant les rôles principaux convoque immanquablement l’iconographie adolescente tant ils sont proches des modèles de prédilection de deux des plus grands dessinateurs friands du sujet. Avec son cou flexueux et son corps à la fois gracile et noueux, Matthieu est un pur Mac Avoy. Tandis que John Fordyce avec son visage à l’ovale parfait et sa frange blonde semble tout droit sorti d’un Signe de piste illustré par Pierre Joubert qui a d'ailleurs illustré un roman pour la jeunesse, "La neuvième croisade" sur ce thème.
 
 
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La lente progression des garçons se fait dans un paysage de rocailles à la blancheur crayeuse. À l’opposé du dépouillement de ce décor Wajda, soudain, nous propose un monument de « kitcherie » homo avec le château du comte et sa piscine aux paons dans laquelle s’ébattent les adolescents !
Le film, loin de tout naturalisme, s’apparente au conte… un conte noir qui rappelle celui dans lequel les enfants de la cité de Hamelin sont entraînés dans la mort par le pipeau du chasseur de rat.

 

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La vraie question qui se pose à la vision de ce film est : quelle a été l’idée directrice qui a présidé à la réalisation de La Croisade maudite ? À cette question, qui devrait être celle que l’on se pose après avoir vu chaque film, on est bien en mal d’y répondre tant le film peut être interprété de façons contradictoires : l’innocence d’enfants et adolescents crédules et naïfs, trop aisément manipulés ; mais aussi leur cruauté naturelle, leur homosexualité comme perversion et péché ou comme une tendance profonde les portant à se dépasser ? L’absurdité de leur aventure mais aussi la force d’une passion et d’un amour qui bousculent le rationnel et les conduisent à la transcendance, au mysticisme ? On peut aussi lire le film comme une charge contre toutes croyances en quelque chose de supérieur à l’animal humain. N’oublions pas que Wajda œuvre dans la Pologne marxiste. Partant d’un fait historique qui confine à la légende, il peut nous montrer que l’homme est une créature infiniment complexe qui ne saurait sublimer totalement ses pulsions les plus instinctives et que la foi mystique qui peut dicter ses actions, en apparence les plus désincarnées et les plus pures, ne lui vient pas de la part de divin qu’il recèlerait mais au contraire de ce qu’il y a de plus fragile et de plus charnel dans sa nature. L’innocence que certains veulent voir dans l’enfance, appelée à vaincre les forces du mal, n’existe pas. Ce n’est pas l’appel de Dieu qui se fait entendre des enfants, c’est bien plus prosaïquement celui de leur dieu. Et ce dieu est un des leurs. Un garçon blond sorti d’un livre d’images dont le charme physique exerce sur eux un attrait irrépressible. Les motivations de leur guerre sainte ne sont pas plus divines que celles, colonisatrices, de leurs aînés. Tout un peuple de chérubins se met en marche à l’appel d’un dieu de chair qui ne sait pas mieux que lui résister aux tentations et qui s’est laissé soumettre par l’amour d’un homme.
Si il n’y a pas – semble-t-il – de morale claire à ce film, on peut tout de même discerner que le souci principal de Wajda a été de gratter les apparences pour découvrir l’essentiel.
La métaphore politique est elle aussi fort ambiguë : critique de toute foi aveugle, du stalinisme (?), de la soumission à la parole d’un maître, d’un chef ? Comme est ambiguë cette phrase dite au début puis à la fin du film : « Ce ne sont pas les mensonges mais la vérité qui tue l’espoir. »
L’attirance qu’exerce Jacques sur les êtres de tout sexe met au premier plan l’histoire d’amour entre Ludovic et Alexi. Wajda n’a pas tergiversé sur l’homo érotisme du film qui s’ouvre par une scène où l’on voit un homme dévêtu par d’autres hommes habillés de robes ! Le cinéaste réitérera l’exercice en faisant commencer Danton de la même façon.

 

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Historiquement, les croisades des enfants se constituent de deux cortèges qui partent, dans l’euphorie des croisades, indépendamment l’un de l’autre, de l’Allemagne et de la France. Elles se situent entre la quatrième et la cinquième croisade, dans l’année 1212. Elles ne sont pas en réalité constituées que d’enfants mais d’« enfants de dieu », principalement des paysans pauvres. Elles ne sont pas couronnées de succès : l’une échoue dans les villes d’Italie et l’autre à Marseille. Ce site fait le point sur la question.
La Légende de la Croisade des enfants, est relatée dans le petit livre de Marcel Schwob, La Croisade des enfants (1896). Mais le plus beau roman sur les croisades, La Joie des pauvres (éditions Gallimard) est signé Zoé Oldenbourg.
Pour en revenir au cinéma, Serge Moati en 1988 a consacré un téléfilm beaucoup plus sage que La Croisade maudite à la croisade des enfants.
Si la lecture des génériques, qui ont tendance à devenir de plus en plus pléthoriques, est fastidieuse, elle révèle parfois de savoureuses surprises. Ainsi dans celui de La Croisade maudite, nous découvrons le nom de Pierre Kalfon en tant que coproducteur. Cette présence explique peut-être la scène particulièrement gratinée de fouettage sado-masochiste d’Alexis par le comte. Scène qui n’est pas sans en rappeler une d’un film réalisé par ce même Pierre Kalfon, La Cravache, dans laquelle on voit un père cravacher avec un plaisir non dissimulé le fessier très tentant de son grand fils.

 

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La Croisade maudite fit scandale en Pologne où il fut critiqué tant par le pouvoir marxiste que par l’Église et où il n’eut qu’une brève carrière. Il ne sortit qu’en catimini dans le reste du monde alors que c’est un film européen « type » : production britannique, réalisateur polonais, tournage des extérieurs en Yougoslavie (aux alentours de Titograd), acteurs anglais et allemands, figuration yougoslave. En 1972, le réalisateur battait déjà sa coulpe : « J’ai suivi le script trop aveuglément. Je pensais que l’amoralité de la liaison entre le jeune homme et le comte pouvait être l’écho retentissant du drame véritable. J’avais tort. En même temps, ce que j’avais cherché dans le sujet, la cruauté de l’image des enfants tentant d’accomplir la tâche des adultes en rétablissant l’ordre dans le monde, n’est pas apparu dans le film. Les enjeux moraux y sont à peine évoqués... J’ai eu de la chance de faire un film sur la contestation avant la lettre, sur des événements qui, peu après l’achèvement de La Croisade maudite allaient occuper le devant de la scène. » par un plan d’un jeune garçon nu faisant sa toilette dans un baquet, une scène qui ne semble pourtant pas indispensable à la progression dramatique du film.
Aujourd’hui Wajda, devenu beaucoup plus consensuel, récuse le film et ne le fait pas figurer dans les rétrospectives qui lui sont consacrées. Il est devenu très difficilement visible.

 

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744 -Trailer -Puertas del Paraiso (Gates to Paradise), 1968 UK @Aleman#SubEng 78´00´´

 

Gates to Paradise 1968 Jenny Agutter; complete, English subtitles


Pour plus d’informations, le témoignage du réalisateur :

« It was my idea to make the children's crusade the subject of my next film, based upon Jerzy Andrzejewski's story. When I shared this project with Andrzejewski, he responded with his usual enthusiasm. It took us months, however, to produce the first scenes from which the plot of the future film would emerge:
The rejection of the project by Polish Cinematography Committeee meant that the delicate, poetic substance of Gates of Paradise would be exposed to the brutal realities of international film coproduction. The dialogues were translated into English and I have never learnt whether the translations conveyed anything beyond the bare message. Young actors were summoned, with Mathieu Carri(e)re as the only veteran (of Schlöndorff's wonderful film Die Verwirrungen des Zöglings Törless). Two male roles were given to actors I knew from films by Polanski who was trying to help me with the difficult casting. Finally we decided on Yugoslavia as our location. The film was so dominated by the rocky mountain landscape that the crusade seemed to be standing immobile on the screen, rather than marching on for weeks on end.
I felt trapped and confined.
Gates of Paradise, which had inspired me with such high hopes for so many years, might have been the dream film of my life. Today, as I look at the photographs of the boys' faces, so beautiful and clear, or leaf through the sketches done on odd bits of paper and featuring Blanka's windblown hair enveloping Alexis' head or two boys, dressed up as angels, carrying a third one, whose wings are broken; or when I recall the breathtaking beauty of the Yugoslav landscape, now in ruin and decay, I really cannot say why I failed to show all this on the screen. The only answer I have is that I had trusted my most intimate dreams to a group of chance people - producers, actors, technicians - who reduced them down to match their own tastes and sensibilities, leaving me absolutely helpless. »
Andrzej Wajda
VRATA RAJA ou GATES TO PARADISE (LA CROISADE MAUDITE), un film d'Andrzej Wajda (réédition complétée)
ci-dessus double page consacrée au film dans "Films and filming"

ci-dessus double page consacrée au film dans "Films and filming"

 

 

Commentaires lors de la première parution du billet

 

sirius21/08/2016 16:51

Ce film, dont j'ignorais l'existence dans la filmographie de Wajda, est ancien, car présenté au festival de Berlin 1968 et donc probablement tourné en 1967 (avant le Printemps de Prague)..

 

lesdiagonalesdutemps21/08/2016 16:56

Il est surtout désavoué par le cinéaste qui interdit de le faire figurer dans ses rétrospectives. Il y a une quinzaine d'années, il ne voulait pas non plus qu'il soit édité en DVD.

 
 

Bruno21/08/2016 14:35

Merci pour ce beau rappel. Et dire que j'ai vu ce film, dans une petite salle du Quartier latin, il faudrait vraiment que je dépouille...mes carnets. Je me souviens du comte...

 

lesdiagonalesdutemps21/08/2016 20:42

C'est amusant que vous me parliez de la Cravache que j'ai vu en salle lors de sa sortie. Lorsque j'avais ma maison d'édition j'ai rencontré Kalfon pour lui proposer d'éditer son film en DVD. Film extrêmement confidentiel. Kalfon m'a reçu très aimable; derrière lui il y avait le master du film. Je lui ai fait un chèque de 10000 F (c'était avant l'euro), chiffre plus qu'honnête en regard de la faible notoriété du film, il n'avait qu'à prendre la cassette me la tendre et empocher le chèque mais il m'a dit que cela ne changerait rien à ses dettes et que ça ne l'intéressait pas je suis sorti furieux et personne n'a plus vu son film. Ce qui me parait absolument stupide.

 
 

sirius21/08/2016 17:55

Curieusement les films de Wajda sont mal distribués en DVD. Je n'arrive pas à trouver "Le chef d'orchestre".
Pour en revenir à un coproducteur du film "la croisade maudite" , Pierre Kalfon, je ne sais pas si son film "la cravache" a finalement pu être distribué. Je l'avais vu en avant-première en présence du réalisateur lors de séances spéciales au cinéma le Studio 28..Je me souviens, lors de cette présentation, qu'il disait que la Commission de censure voulait l'obliger à couper une scène de baiser entre deux garçons.

 
 

lesdiagonalesdutemps21/08/2016 17:18

Je n'en doutais je corrige.

 
 

Bruno21/08/2016 17:14

Une minuscule petite coquille au niveau de la "fiche technique" ? (2007 ?), juste pour montrer que je lis les billets, de surcroit... ;-)

 
 

lesdiagonalesdutemps21/08/2016 16:54

Vous avez eu de la chance car ce film est sorti en catimini en France. Il a été rapidement désavoué par Wajda si bien qu'il ne figure pas dans les rétrospectives du cinéaste. Hors la toile il est assez difficile à voir.

9 mars 2020

Francesco Mazzola, appelé Parmigianino, Bow Carving Amor , vers 1533-35

Francesco Mazzola, appelé Parmigianino, Bow Carving Amor , vers 1533-35

 

9 mars 2020

Diplomatie, un film de Volker Schlondorff

 

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Pour une fois je vais plaider pour ma chapelle, ou plutôt pour mon ancienne chapelle car je crois qu'aujourd'hui plus personne aurait l'idée de me confier la captation d'une pièce de théâtre, d'ailleurs les éventuels commanditaires doivent me croire mort... Définitivement je ne vois pas l'intérêt d'adapter une pièce de théâtre au cinéma quand celle-ci a été correctement mis en scène surtout quand c'est avec les acteurs qui ont joué la pièce que l'on tourne le film. Une captation serait tout aussi efficace et aurait l'avantage de ne pas dénaturer l'oeuvre initiale. N'ayez plus en tête les captations de jadis style « Au théâtre ce soir », aujourd'hui avec quatre ou cinq caméras pour une pièce comme Diplomatie ont peut donner à l'image le même dynamisme que dans un film classique. Bien sûr certains metteur en scènes font de leur film tout autre chose que la pièce d'origine, si bien que l'on reconnaît à peine la pièce qui a inspiré le film, il n'y a qu'à penser à Resnais alors que d'autres filment leur propre mise en scène. Ils réalisent en somme leur propre captation, voir certains film de Guitry mais vous conviendrez que des auteurs du calibre de Resnais ou de Guitry n'encombrent pas les studio.

Après ce long préambule examinons le cas de « Diplomatie » où Volker Schlondorff n'a guère fait qu'ajouter scénaristiquement que de fâcheuses broderies sur la pièce de Cyril Gély.

Evacuons d'emblée la prestation des acteurs. Elle est époustouflante et mérite toutes les louanges, mais André Dussollier et Niels Arestrup étaient déjà fabuleux sur scène où, comme dans le film ils interprètaient respectivement l'ambassadeur suédois Nordling et le général von Choltitz gouverneur de la place de Paris. Nous sommes en aout 44, les alliés sont aux portes de Paris. Nordling est venu rencontrer von Choltitz pour persuader ce dernier de ne pas détruire Paris comme le lui a ordonné Hitler. L'histoire est déjà connue, non qu'on apprenne cela sur les bancs de l'école puisque depuis Tarantino la jeunesse (enfin celle qui a un vague intérêt pour l'Histoire dont l'unique héros ne serait pas Saladin le magnifique) est persuadée qu'Adolf a été flingué par des juifs américains dans un cinéma de quartier à Paris vers 1943, mais par ceux qui ont découvert cet épisode dans « Paris brûle-t-il? », le film des années 60 de René Clément. Les protagonistes de cette négociation étaient alors interprétés par Gert Frobe et Orson Welles, pas des nains, mais qu'Arestrup et Dussolier parviennent à éclipser, ce qui n'est pas rien. J'étaye ce que j'avance, que les spectateurs de « Diplomatie » sont presque tous des survivants de ceux du film de Clément. Lorsque je prend place dans une salle de cinéma, je regarde toujours sa composition. Pour ce film j'ai eu l'impression d'être tombé dans une après midi récréative d'une maison de retraite. C'est pas avec « Diplomatie » que la vente de pop-corn va exploser!

Le cinéaste qui adapte une pièce se croit malheureusement obligé de l'aérer. C'est à dire de tourner des scène hors du huis clos où est le plus souvent circonscrit l'action de la pièce. Dans le cas présent c'est particulièrement fâcheux. Cette « aération » consiste principalement en deux scènes. Une particulièrement lourdingue: deux SS dépêché par Himmler viennent donner un ordre à von Choltiz, la scène n'a pour but que de rappeler que les SS sont très méchant et que l'armée régulière allemande l'est beaucoup moins, on sait aujourd'hui que c'est un peu plus compliqué que cela. Cet ajout est d'autant regrettable que l'on peut penser que cette intervention à aidé au changement de décision du général allemand alors que dans la pièce la bascule est plus forte car ne venant que de lui même. La seconde principale modification est toute tarantinesque et n'est pas dans la couleur du reste du film qui rappelle par sa facture celle du « Souper » qu'avait filmé Edouard Molinaro d'après la pièce de Jean-Claude Brisville. On y voit un collabo passer brusquement à la résistance tuant d'une balle en plein front un allemand qui avait décider passant outre les ordres de von Choltitz de détruire Paris, scène bien sûr complètement inventée et parfaitement irréaliste.

J'en viens au problème de la liberté prise par les cinéastes sur la vérité historique ou tout du moins ce que l'on considère comme telle. Les récentes entorses faites à cette réalité me paraissent grosses de conséquences sur une population où l'ignorance historique progresse chaque jour. Certes Diplomatie ne va pas jusqu'à falsifier l'Histoire à l'instar d'un Tarantino (ce qui n'enlève rien à son talent formel de cinéaste) mais il est erroné de faire de Nordling un résistant. Les partis pris idéologiques que l'on voit dans Diplomatie semblent dater du résistantialisme du temps du général....

 

Bande annonce du film "Diplomatie" de Volker Schlöndorff (2014).

 

9 mars 2020

Roland Barthes par Tiphaine Samoyault

avril 2016

avril 2016

Lire une biographie, c'est cheminer quelque jours avec quelqu'un; une personne forcément un peu Célèbre, ou même très célèbre puisqu'un auteur s'est distrait de sa propre vie pour s'immerger dans une autre qu'elle a jugée suffisament digne d'interêt pour nous la faire partager. Pour que le chemin de conserve soit agréable, il vaut mieux que le lecteur éprouve de la sympathie pour son compagnon de route qu'il s'est momentanément Choisi. C'est le cas pour ce Roland Barthes raconté par Tiphaine Samoyault, livre qui parfois apparait, comme un second "Roland Barthes par Roland Barthes" car de nombreuses pages sont constituées par de savants collages de textes de Barthes lui-même. Ceux-ci, souvent inédits, proviennent des fameux fichiers du sémiologue et de sa correspondance privée. 

Cette correspondance privée inédite est la grande découverte de l'ouvrage et aussi son grand mystère éditorial; tant les extraits des lettres, particulièrement celles adressées à Philippe Rebeyrol et dans une moindre mesure à Robert David sont admirables. Si bien que l'on ne peut que s'étonner que cette correspondance ne soit pas éditée alors que l'oeuvre de Barthes est près de succomber sous les gloses. Si les deux dernières correspondances citées nous éclaireraient sur les commencements de Roland Barthes, une autre mêlant déclarations amoureuses et réflexion philosophique nous renseignerait sur les dernières années de l'intellectuel. Les extraits et les mentions qui se trouvent dans l'ouvrage appellent même à une édition de toutes la correspondance. Puisque certains des destinataires de ces lettres se nomment Michel Foucault, Genette, Antoine Compagnon, Renault Camus... 

Encore une fois, dans le premier tiers du livre, dont la lecture est très agréable, on ne peut que constater le miroir stylistique qui se produit entre la biographe et son modèle. Il joue à plein jusqu'au début des années 60 qui est la période où Barthes structuralise et se met à jargonner; il reviendra ensuite à la clarté et la biographe fera de même...

Si au début le Roland Barthes de Samoyault est surtout une suite de patchwork barthesien talentueux, au chemin agréablement méandrique, un peu hésitant, souvent riche en découvertes, la suite est plus dans le commentaire de l'oeuvre que dans la description du quotidien de Barthes. Parfois à force de répétitions l'ouvrage prend un ton curieusement durasien. Duras qui haissait Barthes, peut être surtout par Jalousie, le sémiologue ayant eu, avant elle une liaison éphémère avec Yann Andréa. Elle a, émis au sujet de Roland Barthes une de ses plus sublimes conneries: << Je ne peux considérer Roland Barthes comme un grand écrivain: quelque chose l'a toujours limité, comme si lui avait manqué l'expérience la plus antique de la vie, la connaissance sexuelle d'une femme.>>.

Souvent à la lecture de ce livre on se demande, est-on dans un essais ou dans une biographie? C'est sans doute cette indétermination, cette impureté, qui en fait la richesse. Tant le livre est en rupture avec les canons du genre biographique. Ce que l'on constate dès l'entame du livre puisque Tiphaine Samoyault commence par l'accident de la circulation dont les conséquences causeront la mort de Roland Barthes. Binet fait débuter son roman par la même scène. Un peu comme si cette fin accidentelle était fondatrice de l'oeuvre!

Dans la lecture d'une biographie, ce sont sans doutes les réflexions incidentes que ce type d'ouvrage génère qui sont les plus intéressantes. Ainsi j'avais oublié, à moins que je l'ai jamais su l'engagement théâtrale de Barthes en tant que critique (je ne parle pas de la controverse autour de Racine) au coté de Bernard Dort. Cette méconnaissance n'ayant toutefois rien d'extraordinaire ayant eu accès au théâtre alors que Barthes avait déjà quitté la scène.

Un des chapitres du livre ressuscite un temps où le théâtre était le lieu  privilégié pour l'intellectuel de son intervention politique et sociale. Le théâtre était vu alors comme l'art politique et civique par excellence. Dans ces années 50 le phare de ce mode d'expression est Brecht pour la notoriété duquel, Barthes a beaucoup oeuvrer. Pour Barthes, le théâtre doit être purifié de ses structures bourgeoises, désaliéné de l'argent et de ses masques. Le héros de ce théâtre est alors Jean Vilar avec son T.N.P. Chaillot enregistre 5193895 entrées soit 2336 spectateurs par représentation. Beaucoup de ces spectateurs étaient un peu des spectateurs forcés, envoyés par palanquées entières par les comités d'entreprises des grandes firmes; aujourd'hui c'est plutôt les lycéens que l'on emmène par charretées au théâtre. Il est à craindre, que comme hier, il n'en reste rien quelques années plus tard, car que sont devenus ces millions de spectateurs? A la fin du T.N.P. Ils se sont évaporés. Dans les deux décennies qui suivent le champ de la contestation intellectuelle, par les intellectuels, se déplacera du théâtre aux sciences sociales. Là encore  on ne peut que constater que depuis que ce terrain de jeux a été déserté par les intellectuels médiatiques, nulle floraison est advenue.

Il m'arrive assez souvent, en lisant la biographie d'un illustre de me découvrir quelques points communs avec la dite célébrité et cela me réjouit. Non comme pourrait le penser les mauvaises langues pour me pousser du col et me rengorger d'avoir les mêmes pratiques que la star, mais lorsque le biographe est talentueux, pour comprendre les raisons que j'ai d'agir comme je le fais en explicitant l'habitude de l'homme célèbre. Ainsi Tiphaine Samoyault m'a fait comprendre mieux mon appétence aux voyages et m'a éclairé sur les rites de ceux-ci en me faisant m'apercevoir qu'ils sont proches de ceux de Roland Barthes.

J'ai un autre point commun avec l'auteur des "Fragments amoureux celui de la fréquentation assidue, durant une période de ma vie, disons de 1975 à 1980, des gigolos de Saint-Germain des près et plus rarement de ceux de la rue Sainte Anne, même pour le sexe j'ai toujours préféré la rive gauche. Comme l'écrit fort justement Tiphaine Samoyault qui, et c'est tout à son honneur n'esquive pas le sujet, cette fréquentation ne devrait pas manquer de choquer quelques belles âmes: << Aujourd'hui où la sexualité s'est à la fois privatisée et puritanisée, ces pratiques courantes peuvent apparaitre comme des comportements excessifs ou déviants. Le virus du sida n'a à l'époque pas encore été découvert; la multiplication des partenaires est presque la règle chez les homosexuels. Il suffit de lire quelques auteurs contemporains de Barthes pour découvrir les usages communs du temps: Tony Duvert, Hervé Guibert, Renaud Camus, tous auteurs que Barthes à rencontrés, connait; il a même pu être séduit par eux ou en être passagèrement amoureux.>>. J'ai donc partagé très probablement quelques partenaires sexuels de passage avec le grand homme. Comme vous pouvez le constater chaque jour cela ne m'a pas rendu plus intelligent, mais là encore cette similitude dans la pratique de la drague tarifée me fait mesurer l'abîme qui sépare les us et coutumes d'il y a quarante ans avec ceux de notre époque. Il existe aujourd'hui un véritable tabou dans le milieu gay sur cette prostitution qui s'étalait chaque soir devant le drugstore Saint Germain. A telle enseigne que lorsque dans plusieurs billets précédents j'ai fait un appel à témoignage d'anciens clients ou de prostitué sur ce sujet, je n'ai eu aucune réponse... Je peux témoigner que si je n'ai jamais vu Roland Barthes, contrairement à Aragon arpenter les trottoir où fleurissait ce commerce, ceux si était bien achalandés... Je réitère donc ma demande: si vous avez des souvenirs sur cette pratique, pour laquelle je n'ai aucune honte, ni regrets ni remords, faites les nous partager... 

Le livre parvient à n'être ennuyeux que dans les chapitres voués aux arguties telquelistes, tant ces escarmouches entre sodomiseurs de drosophiles nous paraissent d'une autre époque. Je me suis surpris à me demander pourquoi les coulisses littéraires de la galaxie gidienne m'intéressent, toujours un siècle après, alors que je ne parviens pas à trouver un quelconque bénéfice à la lecture des minutes de la guérilla entre les chapelles littéraires des années 70?  

Tiphaine Samoyault aime assez son grand homme pour ne pas lui donner le coup de pied de l'âne. Ainsi elle passe assez vite sur son navrant voyage en Chine; périple où l'avait entrainé Sollers, alors ultra-maoiste. Barthes déjà tiède envers l'auteur du petit livre rouge est revenu de ce escapade, au cours de laquelle il s'est copieusement emmerdé, totalement guéri de la fièvre maoiste. Il nous a donné un "Voyage en Chine" qui est un précieux document sur l'aberrante passion aveugle qui avait saisi l'intelligentsia parisienne. Je m'étonne, ou plutôt je fais semblant de m'étonner, connaissant le politiquement correcte universitaire, que personne n'ait encore fait le parallèle entre le voyage en Chine de la bande à Sollers avec celui d'octobre 1941 en Allemagne de certains écrivains français. Il suffit pourtant de lire l'édifiant essai de François Dufay "Le voyage d'automne" et "Le journal sous l'Occupation" de Marcel Jouhandeau conjointement avec "Le voyage en Chine" de Barthes pour que la similitude de ces deux escapades à 33 ans d'écart de nos intelligents saute au yeux. 

Tiphaine Samoyault a su rendre la fin de son livre particulièrement émouvant par le fait, que contrairement à beaucoup de proches de Barthes, elle croit qu'il serait parvenu à accoucher de ce fameux roman total qu'il ambitionnait d'écrire. Les arguments avancés, suite à l'étude des fragments déjà écrits, sont assez convaincant. Tiphaine Samoyault réfute donc l'idée assez répandue, qu'après la mort de sa mère l'auteur des "Fragments amoureux" se soit suicidé à petit feu et que l'accident fatal soit comme le logique aboutissement de cette longue glissade, mais qu'au contraire au moment du funeste évènement Roland Barthes était à l'aube d'une nouvelle vie.

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9 mars 2020

Sempé

Sempé

 

9 mars 2020

Sparte tome III, Ne pas craindre la mort de Christophe Simon & Patrick Weber

Sparte tome III, Ne pas craindre la mort  de Christophe Simon &amp; Patrick Weber

Je suis ébahi qu'une oeuvre de cette qualité sorte en quasi catimini alors que d'autres, de moindre envergure apparaissent avec fanfares et trompettes. Mais visiblement comme le dit le cher Michel Ciment, Christophe Simon n'a pas "la carte". C'est grâce à mes baguenaudages sur la toile que j'ai appris que la suite (et la fin) de série Sparte était parue.

Dans ce billet, je ne vais pas répéter ce que j'ai déjà écrit dans les recensions des deux premiers tomes (1), vous pourrez utilement vous y reporter mais m'intéresser aux spécificités de cette ultime livraison et appréhender l'oeuvre dans son ensemble maintenant que nous pouvons la lire dans sa totalité. 

Il faut vraiment lire les trois ensemble en raison de la complexité de l'intrigues ou plutôt des intrigues entremêlées et du défaut majeur de la narration, son manque de fluidité. Si le récit se tient bien et que ces trois albums se suffisent en eux même on peut néanmoins penser que la fin du dernier album ne conclut pas la geste puisqu'il se termine  par exemple avec la promesse d'Agésilas de se venger de son frère (voir case immédiatement ci-dessous).




Ou avec le départ du jeune Icare à la poursuite de Dorkis. Lui aussi veut se venger (case immédiatement ci-dessous). En outre la toute dernière case est assez énigmatique.



 

Cela laisserait-il espérer une deuxième époque; la première étant close avec ce troisième album. Mais si c'est ce que les auteurs ont dans la tête, il faudra être patient puisque actuellement Simon est attelé à la reprise de Corentin, la sortie de cet album reprise ne devrait pas trop tarder.

Voyons maintenant le résumé du scénario de "Ne pas craindre la mort" qui ne simplifie pas l'intrigue bien au contraire. J'ai mauvaise grâce à me plaindre d'un scénario riche pour ne pas dire obèse à l'indéniable ambition dramatique et historique, alors que j'ai regretté que certains scripts d'Alix par exemple soient étiques ou que Murena ne fasse pas assez d'embardées fictionnelles par rapport à l'Histoire, mais là Wéber y va tout de même un peu fort rajoutant sans cesse de nouveaux personnages, heureusement il en fait mourir quelques uns...

 

Sparte tome III, Ne pas craindre la mort  de Christophe Simon &amp; Patrick Weber

Grace au chasseur de primes Diodore, le roi de Sparte Nabis a fait arrêter son ennemi Agésilas, qui menait la tête d’un groupe de frondeurs à son autorité. Il a ainsi découvert qu’Agésilas était une femme… et il entend bien la reléguer au rang de servante pour l’humilier plus encore. Il la rebaptise Athanasia et montre sa vraie nature à l’un de ses lieutenants… qui préfère la mort plutôt que d’endurer la honte d’avoir été dirigé par un vagin ! En marge de cette machiavélique vengeance, Nabis reçoit une proposition d'alliance du roi de Macédoine. En échange, il lui offre la garde de la ville d’Argos. Nabis accepte, évidemment, et y place son général Alexandros en tant que gouverneur. Pendant ce temps, Diodore comprend qu’en trahissant Agésilas, il a été roulé dans la farine. Car Dorkis, le fils d’Hélène kidnappé, ne lui a pas été rendu pour autant. Dorkis a intégré le redoutable centre de formation des guerriers spartiates. Désormais, il apprend à combattre jusqu’à la mort, et il se révèle progressivement doué pour cette vie d’abnégation…

 

Sparte tome III, Ne pas craindre la mort  de Christophe Simon &amp; Patrick Weber
Sparte tome III, Ne pas craindre la mort  de Christophe Simon &amp; Patrick Weber
Sparte tome III, Ne pas craindre la mort  de Christophe Simon &amp; Patrick Weber

 

 

Le dessin de Simon est toujours aussi somptueux aussi bien en ce qui concerne les décors que les anatomies. A propos de ces dernière il me semble que Simon a tendance à faire les torse un peu trop long ou les jambes un peu trop courtes. Toujours à propos des corps, les ligues de vertus ont du souffler. Le dessinateur a rhabillé ses spartiate, plus de bites, pardon plus de nudité frontales, alors que dans le premier tome, elles se comptaient par dizaines (ci dessus une case du tome III et ci-dessous du tome I).

 

 

La géographie de la page est toujours aussi inventive et généralement très réussie avec ces cases qui servent de fond à d'autres cases; ceci n'est pas sans rappeler un procédé cher aux comics américain, appliqué à une histoire antique comme Sparte, où les scènes d'action ne manquent pas c'est très efficace et de surcroit plaisant à l'oeil, toutefois le dessinateur aurait pu éviter la case ronde en milieu de planche. Ce n'est guère heureux. On n'avait pas vu cela depuis Bécassine!

Il est dommage qu'a l'instar de son mentor, Jacques Martin, le duo Simon Weber n'est pas vu les bienfaits de la pose dans l'action, car si l'intrigue est bien ficelé, avec dilemme cornélien, fils cachés, lourd secret de familles, félons à la pelle et sang en flot contrairement au modèle martinien, la lenteur n'y a pas sa place. Les dialogues des fondateurs de l'école belge étaient certes ampoulés et abondants mais écrit dans un bien plus beau français que ceux proposés ici par Weber mais il avait le mérite de faire s'attarder le lecteur sur l'image dans laquelle le dessinateur pouvait faire abonder le détail.

Les couleurs, qui ont été vraisemblablement appliquées grâce à un programme informatique par Simon lui même, sont réussies, à la fois cassées et claires, très agréables pour les yeux.

 

chistophe simon

Christophe Simon : autoportrait à gauche dans le premier tome de la série

 

Historiquement non seulement situer une bande dessinée au deuxième siècle avant J.C est original mais en plus relativement tranquille pour le dessinateur car si je ne m'abuse, on ne sait pas grand chose à quoi pouvait ressembler la cité lacédémonienne en ce temps là. Il reste que la reconstitution de Sparte proposé par Simon est très crédible.  Les colonne rouge, que l'on rencontre au début du tome 1, sont tout de même un peu curieuses et font penser au cités minoènnes...

Pour continuer sur l'aspect historique le seul reproche que l'on peut faire aux auteurs est de ne pas avoir cherché à contextualiser leur histoire. Il aurait suffit d'ajouter 15 ou 20 lignes explicatives par-ci par-là ou un petit mémo historique en fin de volume car nous avons à faire à une période assez méconnue du grand public et même du public éclairé (pour être tout à fait informé sur la question, lire: Edmond Levy, Sparte : Histoire politique et sociale jusqu’à la conquête romaine, Éditions du Seuil. juin 2003. et/ou  le n° 56 de la Revue d'Histoire antique et médiévale, paru en juillet 2011, justement consacré à Sparte), une période de décadence pour Sparte qui vit ses dernière heures de liberté avant de tomber sous la coupe de son allié romain. Les hilotes n'ont plus du tout le même statut qu'à l'époque classique : l'armée de Nabis était constituée d'hilotes et le mercenaires étrangers. En cause : le déclin démographique des Egaux! Nombre d'entre eux avaient perdu leur citoyenneté en raison de leurs dettes, et les réformes des rois Agis et Cléomène n'avaient pas rencontré le succès espéré.

A propos du dernier monarque cité il me semble que le moment est venu d'en parler quelque peu car un des héros de "Sparte" est le petit fils de ce Cléomène que l'on peut considérer comme le dernier grand homme de Sparte.

Cléomène III (en grec ancien Κλεομένης / Kleoménês) a été roi de Sparte de 235 à 222 av. J.-C. Issu de la famille des Agiades, c'est le fils de Léonidas II. On peut considérer Cléomène III comme le dernier roi d'envergure de Sparte. Acquis à l'idée d'une réforme radicale de la société lacédémonienne, il s'est efforcé de lui rendre sa grandeur passée en cherchant à restaurer le projet social et politique de Lycurgue. Dans un premier temps, Cléomène cherche à obtenir des succès militaires face à la ligue achéenne pour que dans un deuxième temps, il puisse bénéficier d’un prestige suffisant afin de mettre en place sa politique de réformes. 

 

Sparte tome III, Ne pas craindre la mort  de Christophe Simon &amp; Patrick Weber
Sparte tome III, Ne pas craindre la mort  de Christophe Simon &amp; Patrick Weber

De retour à Sparte après une expédition en Arcadie, il réussit un coup d’État en 227 qui se conclut par des reformes radicales du système politique afin de restaurer la puissance spartiate. Fidèle à l’esprit réactionnaire de son époque, Cléomène cherche à revenir à la constitution originelle de Lycurgue. Pour ce faire, Cléomène supprime l'éphorat, fait exécuter les éphorestitulaires, avant d'annoncer la restauration des institutions traditionnelles spartiates comme les syssities ou l’agogè. Cléomène procède également à un partage des terres et à une abolition des dettes. Il confère la citoyenneté à 4 000 Périèques ce qui permet de renforcer les effectifs militaires qui s'étaient progressivement effondrés. Dans la continuité, il fait équiper la phalange spartiate à la macédonienne. Contrairement à Agis IV, le règne de Cléomène III est marqué par la guerre lors de la période s’étalant de 229 à 222. Dans la première phase de cette guerre qui est dite cléoménique, son armée fait subir défaite sur défaite à la ligue achéenne dont le chef, Aratos, après la prise d'Argos puis de Corinthe par Cléomène, n'a d'autre solution que de se tourner vers l’ennemi héréditaire des Grecs qui est la Macédoine. Afin de regagner de l’influence dans le Péloponnèse, d’Antigone III Doson répond favorablement à cette proposition. L'intervention de la Macédoine dans le conflit change la donne. Bien que soutenu par l'Égypte lagide de Ptolémée III Evergète, Cléomène est chassé d'Arcadie. La guerre se termine par la déroute spartiate àSellasia en juillet 222. Cette défaite provoque le déclin irrémédiable de Sparte. Cléomène s'enfuit en Égypte où il est reçu par le souverain lagide, son ancien allié. Mais après une tentative de soulever le peuple alexandrin contre le jeune Ptolémée IV en 219, il est arrêté et contraint au suicide.

 

Sparte tome III, Ne pas craindre la mort  de Christophe Simon &amp; Patrick Weber

L'histoire de Cléomène est connue par Polybe qui pourtant lui est hostile. Les écrits de Polybe ont comme source les Mémoires d'Aratos. Tite-Live voit en Cléomène « le premier tyran de Lacédémone». Plutarque a écrit sa biographie dans ses Vies parallèles en même temps que celle d'Agis IV. Les deux personnages sont mis en parallèle avec les Gracques. Plutarque est favorable à Cléomène III même si cet auteur utilise Phylarque comme source principale avec une certaine prudence.

On peut dire que que les fascistes du xxe siècle ont été fasciné par l'idéal guerrier de Cléomène III ainsi que par sa capacité à régénéré un corps civique malade. Sa politique de violences notamment celle de son coup d'État en 227 a pu servir de modèle à des acteurs politiques souhaitant s'emparer du pouvoir par le force. En revanche, les théoriciens et les acteurs politiques marxistes n'ont pas su intégrer Cléomène III dans leurs corpus idéologique en raison de l'inexistence d'une universalité dans le cadre de sa politique de réformes sociales.

 

 

Sparte tome III, Ne pas craindre la mort  de Christophe Simon &amp; Patrick Weber

Les auteurs donnent un véritable documentaire sur les mœurs et l’organisation sociale de la Sparte antique avec par exemple une explication de ce qu'était l'éducation spartiate ou une représentation du lesché, petite fête eugéniste où l’on jetait les bébés dans un précipice lorsqu’ils étaient trop frêles. Avec une variante moins spectaculaire voilà une solution à méditer  de nos jours comme remède aux surcouts sociaux...

C'est un beau tour de force dans le domaine de la bande dessinée historique qu'ont réussi Simon et Weber, à travers des personnages attachant et ayant une véritable épaisseur que de raconter, surtout par l'intermédiaire de Diodore, la fin politique de Sparte. Elle va d'ailleurs précéder de peu la chute de la Grèce, et sa conquête par l'Empire Romain. Même si ces considérations historiques me semblent trop peu valorisées, en dépit du personnage de Nabis (tyran et dernier roi de Sparte) qui reste au premier plan durant toute l'histoire. Et puis ce n'est pas tous les jours que l'on peut se mettre sous les yeux une bande dessinée crypto gay d'ailleurs assez peu crypto...

 

Sparte tome III, Ne pas craindre la mort  de Christophe Simon &amp; Patrick Weber

 

9 mars 2020

Trois amis sur la plage de La Canée

Trois amis sur la plage de La Canée
Trois amis sur la plage de La Canée
Trois amis sur la plage de La Canée
Trois amis sur la plage de La Canée
Trois amis sur la plage de La Canée
La Canée, Crète, mai 2016

La Canée, Crète, mai 2016

 

9 mars 2020

Edmund Teske

 

 Edmund Teske

Edmund Rudolph Teske est né le 7 Mars, 1911 à Chicago, il a été un des grands photographes américain du 20ème siècle. Sa production peut se diviser en deux grandes partie sa production d'artistes, principalement des musiciens et des artistes avec et surtout de très nombreuses photographie que l'on peut qualifier d'expérimentale. Son utilisation de techniques telles que : l'estampes combinées à des montages et à des solarisations a conduit à «souvent des images romantiques et mystérieuses". Bien qu'il ait été largement exposée et était bien connu au sein de la photographie d'art au cours de sa vie, son travail n'a pas été largement connu par le public. Il est mort en 1996. Il a été appelé « l' un des grands oubliés de la photographie américaine.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

  

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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9 mars 2020

Gabriel, un court-métrage de Benjamin Chimoy

Gabriel, un court-métrage de Benjamin Chimoy
Gabriel, un court-métrage de Benjamin Chimoy

Réalisation: Benjamin Chimoy


avec Diego Caballero (Gabriel jeune), Jakob Renger (Gabriel adulte), Florian Anderer (Lars).

 

Aujourd'hui Gabriel a 32 ans. Cet espagnol vit en Allemagne avec son petit ami Lars, loin de sa famille conservatrice. Maintes et maintes fois, il se souvient de son enfance dans ses songes; en particulier de son coming-out accidentel, lorsque sa mère a découvert les dessins d'hommes nus qu'il faisait et qu'il cachait dans sa chambre.

Une émouvante évocation de ce coming-out et de l'indifférence d'une mère au talent de son fils...

 

Gabriel, un court-métrage de Benjamin Chimoy
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