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Dans les diagonales du temps
2 mars 2020

Shibuya, octobre 2011

Le garçon et la bête, un film de Mamoru Hosoda
Le garçon et la bête, un film de Mamoru Hosoda
Le garçon et la bête, un film de Mamoru Hosoda
Shibuya, octobre 2011

Shibuya, octobre 2011

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2 mars 2020

Le garçon et la bête, un film de Mamoru Hosoda

Le garçon et la bête, un film de Mamoru Hosoda

 

Il est difficile de rendre compte d'un film aussi riche qui je le sais s'inscrit déjà parmi les tous meilleurs films que je pourrais voir cette année. Il est encore plus difficile de résumer une intrigue aussi foisonnante. Un prologue à l'esthétique propre en voix off nous annonce que nous allons être confronté à une histoire où cohabite deux mondes parallèle, celui des humains et celui des bêtes. Le monde des humains est celui du Tokyo d'aujourd'hui, ou plutôt au début du film de celui d'il y a une dizaine d'années (repérez vous aux voitures entre-aperçues) alors que le celui des bêtes, très humanisé, à quelque chose de vaguement méditerranéen, les maisons m'ont évoqué celles des Cyclade et y vaque une foule d'artisans et de marchands au faciès d'ours, de porc, de chat, de sanglier... Ils vivent en pais sous l'égide d'un seigneur, un vieux lapin sage et souriant. Mais le seigneur fait savoir qu’il a décidé de prendre sa retraite prochainement pour se réincarner en divinité. Deux prétendants à sa succession s’opposent : Iôzen, très populaire, accompagné de nombreux disciples et père de deux enfants, et Kumatetsu, très puissant, mais solitaire et paresseux. Le seigneur des bêtes  demande à ce dernier de former un disciple avant de pouvoir aspirer à devenir son successeur... Chez les humains nous faisons d'emblée connaissance avec le héros, Ren 9 ans qui est bien joli à regarder. Il vient de perdre sa mère. Comme il refuse d'être confié à de lointains parents, il s'enfuit et se retrouve au centre de Tokyo, plus précisément à Shibuya, célèbre pour son carrefour le plus fréquenté au monde (les nostalgiques de Tokyo s'émerveilleront de voir ce quartier si bien transposé en dessin). Il est vite repéré par les policiers qui le poursuivent mais aussi par un étrange voyageur qui cache son corps et son visage sous une grande houppelande pour échapper aux premiers il suit le second qui s'engage dans une ruelle qui bientôt débouche dans le surprenant monde des animaux. Le mystérieux personnage s'avère être Kumatetsu, un ours mal léché qui prend sous sa protection Ren pour en faire son disciple. Ce qui ne va pas aller tout seul! S'il n'a pas de troupe le nouveau mentor de ren à tout de même deux compères, deux « sages », le singe et le cochon-bonze, qui commentent les relations difficiles entre le maitre et son élève. L'apprentissage de « la force » durera 8 ans mais alors le garçon sera attiré par le monde des humains dans lequel il tombe amoureux d'une sérieuse étudiante. Il est alors tiraillé entre les deux univers peut-il abandonner son mentor bravache alors qu'il est tout près d'atteindre son but...

 

 

Le garçon et la bête, un film de Mamoru Hosoda
Shibuya, avril 2010

Shibuya, avril 2010

 

 

Je suis bien conscient que mon petit résumé rend imparfaitement compte du résultat de l'imagination foisonnante de Mamoru Hosoda (qui est aussi le scénariste du film). Entre le début noir du film et sa fin apaisé, dix ans se seront écoulés... Le seul défaut de Mamoru Hosoda c'est d'avoir trop d'idées si bien que ses plus jeunes spectateurs, s'ils ne s'ennuieront jamais risquent de se perdre parfois. Par exemple dans la formidable séquence du voyage initiatique chez les sages, il y a plusieurs autres films potentiels. Le garçon et la bête charrie sans effort plusieurs grands thèmes, les rapports filiaux, le droit à la différence, l'éternel lutte du bien et du mal. Pour s'aider à traiter des questions aussi lourdes, le cinéaste n'hésite pas à s'appuyer sur de grandes oeuvres comme le Moby Dick d'Herman Melville.

 

 

Le garçon et la bête, un film de Mamoru Hosoda
Le garçon et la bête, un film de Mamoru Hosoda
Le garçon et la bête, un film de Mamoru Hosoda

Tout en restant très personnel le graphisme de Mamoru Hosoda est pour la partie « humaine » dans la lignée de ses pairs japonais et... de lui même puisque le joli Ren aurait pu trouver sa place dans les beaux films précédent du cinéaste que sont « Les enfants loups » (un chef d'oeuvre que je préfère à ce néanmoins formidable « Garçon et la bête » on peut aller voir le billet que j'ai consacré à ce film: Les enfants loups, Ame & Yuki, un film de Mamoru Hosoda), « La traversée du temps » ou encore « Summer wars » quant au monde des bêtes il emprunte en l'améliorant aux studios Disney l'esthétique de « La belle et la bête ». L'émouvante scène de fin a des réminiscences d' « Amer béton ».

Ce qui est très fort avec Mamoru Hosoda c'est que malgré toutes ses inspirations, on trouve aussi un bonze au visage de Jedi, la petite boule blanche indéfectible compagne de Ren vient tout droit du « Voyage de Chihiro »... c'est qu'il reste absolument singulier. 

Les photos ci-dessous ont été prises au Carreau du Temple, samedi dernier lors de ma visite à la petite exposition consacrée en ces lieux au film Le garçon et la bête.

 

Le garçon et la bête, un film de Mamoru Hosoda
Le garçon et la bête, un film de Mamoru Hosoda
Le garçon et la bête, un film de Mamoru Hosoda
Le garçon et la bête, un film de Mamoru Hosoda
Le garçon et la bête, un film de Mamoru Hosoda
Le garçon et la bête, un film de Mamoru Hosoda
Le garçon et la bête, un film de Mamoru Hosoda
Le garçon et la bête, un film de Mamoru Hosoda
Le garçon et la bête, un film de Mamoru Hosoda
Paris, janvier 2016

Paris, janvier 2016

 

Bakemono no Ko - Le Garçon et la Bête - Bande annonce VOSTFR - Mamoru Hosoda, 2015

 

2 mars 2020

Inge Prader, Visions - Gustav Klimt.

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
2 mars 2020

Gerard ter Borch (1617-1681)

 Gerard ter Borch (1617-1681)

 

2 mars 2020

Bully un film de Larry Clark

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USA, 2001, 1h 54mn

 

Réalisation: Larry Clark, scénario: David McKenna, Roger Pullis d'après A True Story of High School Revenge de Jim Schutze,

 

avec: Brad Renfro, Rachel Miner, Nick Stahl, Bijou Phillips, Michael Pitt, Leo Fitzpatrick, Kelli Garner, Daniel Franzese, Deborah Smith Ford, Nathalie Paulding

 

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Résumé

 

Bobby Kent est mort le 14 juillet 1993. Jeune lycéen vivant dans les faubourgs de Hollywood, en Floride, Bobby est une petite frappe aux manières brutales. Son meilleur pote Marty et sa petite amie, lassés de subir son sadisme et son perpétuel mépris, de vivre dans la peur, décident, avec la complicité de cinq autres jeunes, de lui tendre un piège. L'attirant dans un marais, les sept ados le lynchent à mort à l'aide de couteaux et de battes de base-ball... Alors qu'il est allongé dans son sang, Bobby demande grâce à Marty. La réponse de ce dernier est instantanée et préméditée : il lui tranche la gorge. L'incident laisse les habitants sans voix, les parents des jeunes meurtriers dépressifs et inconsolables, et un groupe d'adolescents accusés d'un crime sanglant.

 

L'avis critique

 

« Je veux que tu me suces la bite et que tu me lèches les couilles... ». « Il a une queue sublime, il m’a broutée pendant plus d’une heure ! ». Voilà pour les tous premiers dialogues du film du très controversé Larry Clark. Ainsi parlent donc les adolescents dépravés mis en scène par le cinéaste de KIDS. Un film qui alimentait déjà les conversations nerveuses des cinéphiles en 1995. Par pudibonderie il me semble bien qu'il n'y a pas de dvd français de ce film alors qu'il se trouve en import, fort chère, en vente dans les FNAC. Ces ados-là, issus de la classe moyenne, sont tout droit sortis d’un fait-divers sordide commis en 1993. Maisreflèteraient (dans l’optique du réalisateur) à eux seuls des millions de jeunes Américains crétinisés par une sous-culture grandissante. Le cinéaste prend d’ailleurs un malin plaisir à dénoncer cette « génération Eminem » qui dit « Fuck » à chaque fin de phrase, se shoote aux acides, et baise à tout va sous des formes les plus perverses et inimaginables. L’irresponsabilité de leurs actes mécréants et dégénérescents dérange l’esprit d’un spectateur hébété par tant de violence, voire lui donne la nausée. C’est parce qu’il est cruel et pervers dans sa manière de dénoncer l’immense ignorance de ces jeunes en quête d’identité que Larry Clark choque. Il ne juge pas ni ne condamne, mais pose le constat à la fois lucide et désespérant d’un vide intérieur et d’une pauvreté existentielle évidente. Si Clark adore mettre en évidense la nudité, ses images dans Bully ne sont guère érotiques. Il montre la drogue et la frénésie sexuelle comme si cela était la norme. Le sexe et la nudité dans le film sont peu excitants, sauf dans la scène des gogos danseurs dans la boite gay et dans la scène où Bobby se lave frénétiquement les mains, nu devant la glace du lavabo, la caméra le cadre à partir de la naissance de la verge, laissant apparaître les poils pubiens ; ce sera le seul aperçu frontal d’un sexe de garçon alors que ceux des filles sont largement filmés. Comme dans ses photos Clark cadre les adolescents dans des plans toujours serrés sur eux. Il se pose en témoin toujours implacable, mais toujours fasciné par ses jeunes modèles, quelque soit leurs turpitudes. Il filme presque toujours à hauteur de sexe, pour lui le centre de tout. Il utilise peu la plongée et la contre plongée. Il y a dans les personnages de Larry Clark le même «non futur» que chez les personnages d’Araki.

 

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Tout le début du film est centré sur le rapport étrange que Bobby entretient avec la sexualité. On croit que cela va être le moteur de Bully. Il paraît évident que si Marty veut tuer Bobby c’est aussi parce qu’il sait que Bobby le désire sexuellement et qu’il ne peut surmonter cela autrement qu'en tuant celui qui le désire. La piste à suivre paraissait claire et le meurtre aurait été bien plus fort présenté sous cet angle. La vraie question reste comment cette problématique ébauchée pendant presque une quarante minutes peut complètement passer à la trappe ensuite! Car c’est bien deux films et deux histoires qui cohabitent difficilement dans Bully, la première étant abandonnée au profit de la seconde, déséquilibrant ainsi l’ensemble. C’est peut-être là tout le problème de Larry Clark dans Bully pour lequel il n'est pas pas scénariste (c'est néanmoins pour cela que Bully reste à ce jour le meilleur film du réalisateur), il est sans doute plus intéressé par la façon dont il va filmer les corps de ses jeunes acteurs que de gérer la cohérence d’un scénario, coincé entre la reconstitution d’un fait divers réel et le désir de raconter une toute autre histoire, celle de Marty et Bobby, des mœurs particulières d’une génération sacrifiée, pourrait-on dire, même si le terme est galvaudé.

 

Dans ce film Larry Clark apparaît pour la première fois à l’écran dans le petit rôle du père d’une fratrie dont l’ainé est le pseudo tueur maffieux qui apporte sa caution à l’organisation du crime. L’emploi est tenu par Léo Fitzpatrick qui avait le rôle principal dans Kid, ce qui renforce encore l'impression d’unité que l’on a devant l’oeuve du Larry Clark de ses premières photographies à son dernier film.

 

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Le plaisir principal qu'un spectateur peut retirer de la vision de Bully, est la beauté graphique de la danse des corps, de ces jeunes, à la fois innocents et vulgaires, victimes et bourreaux, attirants et écœurants.

 

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Bully, 4

 

Bully 2

 

Bully, 3

 

Bully 5

 

Bully 1

 

Bully, 6

Bully - Trailer

 

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2 mars 2020

Le langage perdu des grues de David Leavitt

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En avant propos à mes considérations probablement oiseuses sur ce livre, une petite constatation. Voilà des mois que je cherchais ce roman, ou plus exactement, que lorsque j’étais en visite dans une des FNAC de la capitale et d’ailleurs, je vérifiais si ce titre, paru chez un grand éditeur Denoel, et un certain nombre d’autres, n’étaient pas dans les rayons. Jamais je ne le vis. Lassé je me suis rendu aux “mots à la bouche” la librairie gay sise dans le Marais et là, les grues m’attendaient... Vive les librairies spécialisées et longues vies à elles puisque les grandes surfaces généralistes soit disant spécialisées dans la culture n’ont plus aucun fond et ne connaissent que les nouveautés...

Je ne sais pas pourquoi, ou alors le mot n’a pas le même sens appliqué à la littérature que dans son acception courante, mais après la lecture d’un deuxième livre, et le plus célèbre, je ne comprend pas bien pourquoi  David Leavitt passe pour le chef de file de l’école minimaliste dans le roman américain contemporain. Peut être pour le peu d’ événements autres que ceux de la vie quotidienne que l’on trouve dans ses livres? Ce n’est en aucun cas pour son style; car si celui-ci n’est certes pas fleuri, mais il n’est pas du tout sec et laisse une place à des descriptions aussi précises que justes alors que la plupart des compatriotes de Leavitt ne font aujourd’hui de leur livre qu’une suite de dialogues. Peut être dans l’espoir de favoriser leur adaptation au cinéma?

La grande qualité de Leavitt est sa prodigieuse clarté et la justesse de  ses analyses psychologiques. Si bien que l’on se surprend à s’exclamer presque à chaque page: << Comme c’est vrai! >>. Malheureusement cette qualité n’est pas sans un avers moins chatoyant. Car le livre n’étant qu’un travail pour serrer au plus prêt la psychologie d’une poignée de personnages faut-il que l’on rentre un minimum en empathie avec ceux-ci, tel n’a pas été tout à fait mon cas.

La majeure partie du livre tourne autour de trois personnages et l’on peut regretter d’emblée que ce soit les moins intéressants que nous allons croiser dans l’ouvrage. On voit par là que Leavitt évite le romanesque en le laissant à la lisière de son récit ou en évacuant assez vite, les personnages, comme Elliot, l’éphémère petit ami de Philip, qui aurait pu apporter plus de couleur à son roman. C’est sans doute pour cette raison que les critiques américains lui ont collé cette étiquette de minimaliste.

Owen et Rose approchent de la cinquantaine. Ils sont mariés depuis 27 ans. Ils se sont épousés plus, parce que ils ont entériné qu’ à l’âge adulte il fallait se marier, que par amour. Ils ont eu leur fils, Philip, il y a 25 ans, un peu pour les mêmes raisons. S’ils l’ont aimé, peut être même plus que de raison, le garçon rêveur et renfermé, rapidement s’est éloigné affectivement d’eux. Depuis une vingtaine d’années le couple habite le même appartement au coeur de Manhattan. Mais il vont devoir le quitter, leur propriétaire le vendant et il n’ont pas les moyens de l’acheter. On découvre vite la grande et seule originalité du livre qui pourrait faire croire que l’homosexualité est héréditaire en effet Philip comme son père Owen est gay. Le couple des parents rappelle celui de  Loin du paradis.

On peut trouver surprenant que le fils soit aussi timoré dans la vie que ses parents. On imaginerait plutôt qu’il cherche à vivre d’une manière aux antipodes de celle de ses ternes géniteurs, malheureusement pour le lecteur, il n’en est rien et on est assez vite horripilé par un tel plat de nouilles comme on le disait dans mon enfance.

Il est dommage pour la crédibilité de l’histoire que son auteur ait nanti ses trois personnages principaux d’occupation assez extraordinaire qui sont peu en phase avec leur extrême banalité. Rose est correctrice dans une maison d’édition. Son fils directeur d’une collection de romans sentimentaux, style Harlequin, dans une autre. Quant à Owen il sélectionne quels seront les futurs élèves d’un collège huppé.

Toutefois il est intéressant de remarquer que ces deux hésitants et falots personnages ne vivent pas leur sexualité de la même façon. Si, ils sont de caractère semblable, ils sont aussi le fruit de leur époque. Le père est resté dans le placard et n’assouvit ses penchants, qu’il juge coupable, chaque dimanche après-midi sous forme de branlettes furtives dans un sordide cinéma porno. Son fils lui, fréquente les bars gays, ce qui est pour lui une sorte de substitution à sa sexualité. Très finement Leavitt, par le truchement de ces deux attitudes nous montre l’évolution de la société.

La famille va connaître un séisme lorsque Philip fait son coming out, à 25 ans!

New-York est un personnage à part entière de ce roman qu’il n’est pas inutile de lire un plan de Manhattan sous la main pour suivre les errances des protagonistes. Grâce à cet aide un amoureux de la ville verra son plaisir de lecture augmenté.

Le titre du livre est donné par un court chapitre, qui pourrait être une petite nouvelle autonome, dont la conclusion serait: on aime jamais que le reflet de soi-même dans l’autre. Je ne sais pas pourquoi avant la lecture, je m’imaginais que les grues en question étaient les oiseaux migrateurs. Il n’en est rien. Il s’agit des engins de chantier...

L’ acuité des analyses psychologiques contenues dans le livre débouchent sur des phrases comme celle-ci << Ma sexualité, mon attirance pour les hommes est la force élémentaire, le moteur de mon existence...>> qui devrait alimenter bien des réflexions chez le lecteur. Cette dernière est fidèle à la tonalité générale du livre très pessimiste car que reste-t-il à celui dont le seule moteur est la sexualité, et ce n’est pas vrai que pour les homosexuels lorsque la libido s’éteint...

C’est avec beaucoup de finesse que l’auteur décrit l’ omniprésence du sida et l’influence qu’il a sur la vie quotidienne; même si celui-ci n’arrive jamais au premier plan du récit, écrit en 1986, au pic de la pandémie, dans lequel il n’y a aucun protagoniste atteint par la maladie mais néanmoins jamais on peut l’oublier: << Mais ces visages, à présent étaient devenus familiers et paraissaient aussi fatigués de chercher que les leurs. Peut-être reflétaient-ils le deuil d’une époque révolue, une époque où tout était permis, où régnait l’amour libre, le plaisir innocent, où il suffisait d’un clin d’oeil, d’un sourire pour monter dans une chambre faire l’amour. Maintenant, la monogamie était de mode,mais elle avait pris la forme d’une règle de sécurité, d’une mesure anticatastrophe désagréable mais indispensable, comme l’une de ces recettes datant de la seconde guerre mondiale qui permettait de tirer le maximum de la viande rationnée devenue si précieuse... Les hommes se retrouvaient  en couple, réduit au choix de vivre seuls ou de continuer à vivre avec un partenaire  qui, s’il devait vous transmettre le virus, l’avait de toute façon déjà fait. Ainsi se constituaient les couples; la peur était le chemin détourné qui menait à la monogamie, et parfois, au bonheur.>>.

Il m’est arrivé avec ce roman de Leavitt ce qui se passe de plus en plus souvent lorsque je regarde un film. Je me demande, si, dans la “vraie” vie, serais je resté deux heures avec de tels médiocres? Ici on peut remplacer film par livre, regarder par lire et deux par six heure, je lis de plus en plus lentement. Il m’a fallu attendre la page 286 pour éprouver de la sympathie pour l’un des personnages, en l’ occurrence Philip.

“Le langage perdu des grues” possède une particularité tout à fait exceptionnelle dans la littérature, ses héros à la fin de cette histoire sont moins pitoyables qu’à son début. On le voit que ce roman n’est pas tout à fait réaliste car c’est encore plus rare dans la réalité.

 

Nota:
1- Je rappelle que le dernier roman de Leavitt, Le comptable indien de David Leavitt paru en 2009 chez Denoel est un chef d'oeuvre. J'ai consacré un billet à ce roman.
2-Autre livre de Leavitt de moindre envergure mais néanmoins d'une lecture très agréable, “Le manuscrit perdu de Jonah Boyd", trouvable en édition de poche chez 10-18

 

2 mars 2020

The lost language of cranes de Nigel Finch

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Réalisation: Nigel Finch, scénario: Sean Mathias d’après le roman de David Leavitt, musique: Julian Wastall, image: Remi Adefarasin, montage: Sue Wyatt
avec: Brian Cox, Angus Macfadyen, Eileen Atkins, Corey Parker, Ben Daniels, John Schlesinger, Rene Auberjonois, Cathy Tyson, Richard Warwick, Nicholas Le Prevost
 

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Résumé

Philip, un jeune londonien (Angus Macfadyen) qui vit difficilement son homosexualité décide, après avoir rencontré le garçon qu’il espère être celui de sa vie, de faire son coming-out auprès de ses parents. Mais son annonce va précipiter la famille dans une crise qu'il ne pouvait pas imaginer car son propre père Owen (Brian Cox) est homosexuel, un secret qu'il a dissimulé à sa femme Rose (Eileen Atkins) depuis leur mariage. Dans le même temps, Philip découvre qu’Elliot (Corey Parker), le jeune américain manipulateur, dont il est amoureux, est beaucoup moins stable que lui, et soudain, toutes les parties concernées s’aperçoivent qu’ils ont construit leur vie sur des fondations de sable...
 

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L’avis critique
 
The lost language of crane est l'adaptation du beau roman de David Leavitt paru en France sous le titre "Le langage perdu des grues" aux éditions Denoel. J'ai consacré un billet à ce roman c'est ici.
Pour commencer je voudrais rappeler que je suis toujours un peu méfiant pour tous les films qui ne sont pas issus de scénario originaux. Ce sont les plus nombreux et j’en conviens les réussites sont innombrables. Ce qui fait que je ne m’explique pas  vraiment cette réticence d’emblée, mais c’est ainsi. Je suis encore plus circonspect lorsque il s’agit d’une transposition dans l’espace ou dans le temps d’une intrigue. Là pourtant j’en convient également les réussites existent. Deux, parmi bien d’autres, me viennent à l’instant à l’esprit, le Richard III de Richard Loncraine et “Embrassez qui vous voulez” de Michel Blanc...
 

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“The lost language of cranes” a été réalisé par Nigel Finch en 1991 pour la BBC. C’est donc un film totalement anglais par son financement, sa réalisation et la plupart de ses acteurs. Il a été tourné à Londres (c’est avec plaisir que j’y ai aperçu Regent Park). Et pour le lecteur du roman éponyme de David Leavitt, à l’origine du film, c’est la première déception tant le récit était ancré dans la géographie de New-York. La ville ayant le statut de personnage à part entière dans le roman.
 

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La délocalisation de l’histoire a posé un problème inattendu, car le cinéma porno, qui joue un rôle important dans l'histoire, a été un réel casse tête pour l'adaptation. Tout simplement parce qu'il n'y avait pas de tels endroits en 1991  à Londres (avec le net je ne suis pas sûr qu’il en existe beaucoup de par le monde aujourd’hui), en raison des lois britanniques. Donc, le scénariste, Sean Mathias, a décidé de "créer" un cinéma porno à Londres qui n'a jamais existé, il l’a d'ailleurs appelé "Fantasy"!
 

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Lorsque on lit un livre on s’imagine chaque personnage, même si ceux-ci ne sont pas décris en détail par l’auteur, comme c’est le cas dans le livre de Leavitt, on les visualise. Il est donc toujours périlleux, surtout lorsque la lecture est récente, comme c’est mon cas, pour le roman dont est tiré le film, de confronter ces images nées de notre imagination avec les physionomies des acteurs choisis par le réalisateur pour les incarner. Dans le cas présent et à cette aune des souvenirs de lecture, si Eileen Atkins est une parfaite Rose, il me semble que c’est une véritable erreur de casting d’avoir donné le rôle d'Owen à Brian Cox, par ailleurs excellent comédien, (parfait, comme toute la distribution) qu’on se souvienne de sa prestation dans "LIE". Owen aurait du avoir un aspect moins solide, moins sûr de lui alors que Cox dégage naturellement, par sa stature massive, une tranquille assurance. De même le Philip du roman est beaucoup plus falot que celui du film. Angus Macfadyen, lui aussi remarquable acteur, est un peu trop beau, un peu trop mâle. Ce qui ne provoque pas assez de contraste entre lui et Elliot le dominant de l’ éphémère couple qu’ils forment.
 

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Nigel Finch n’a gardé que les temps forts du roman, alors que ce qui faisait une partie de la qualité de ce dernier c’était justement ses temps faibles, les moments d’errance et de doute des membres de la famille Benjamin. Si bien que l’on a le sentiment d’assister de la part des comédiens à l’ exécution une suite de morceaux de bravoure dont il faut dire qu’ils s’ acquittent fort bien. A la décharge du réalisateur, il faut rappeler qu’une heure trente de film,  correspond en moyenne à une centaine de pages d’un roman. Celui de Leavitt en compte 300...
 

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L’adaptation a surtout sacrifié le personnage de Jerene, la colocataire d’Elliot, jouée par Cathy Tyson, qui dans le roman, a un caractère complexe. Etudiante noire et lesbienne elle a été rejetée par ses parents. Elle développe une thèse sur les langues qui sont perdues à jamais, comme celle de ce petit garçon qui, négligé par sa mère, a appris à communiquer en observant les grues du chantier qu’il voyait de sa fenêtre. Dans le film, elle ne semble être là que pour  seulement expliquer le titre du film et guère pour autre chose.
Lorsque l’on ramène un tel livre à sa seule anecdote, un peu comme pour "Madame Bovary" avec lequel le roman de Leavitt à bien des points communs (Rose ne souffrirait-elle pas de bovarysme?) il ne reste plus grand chose.
 

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J’ajouterais qu’il n’est pas indispensable d’avoir lu le roman pour apprécier le film, bien au contraire.
Le centre du film n'est pas en fait une histoire d'amour gay, mais celle d'une famille, les Benjamin, et à la façon dont elle fait face (ou non) à la vérité.  À la fois le père et le fils sont homosexuels, et la mère, Rose, a vécu dans le déni pendant des années, jusqu'à ce que son fils brise le non dit.
Le travail de Nigel Finch permet d'étudier chaque nuance de l'interaction entre les personnages  et pour cela il ne s’appuit pas principalement sur les dialogues qui ne sont qu’un aspect mineur de leurs communications mais utilise des moyens purement cinématographiques. Contrairement à de nombreux films gays, en particulier américains,  les personnages gays ne sont pas idéalisés, ils sont montrés comme des personnes faillibles. Owen, notamment, se détache comme une fascinante figure d’ égoïste dont la lâcheté, la peur que l'admission du lycée où il travaille découvre son orientation sexuelle, seront les causes d’immenses douleurs pour sa femme.
 

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C'est un des rares films que je connaisse qui traite de l'angoisse de ce que doit être le quotidien de la vie des gays qui doivent dissimuler leur véritable nature à leurs très proches. Il aborde aussi une question encore plus rarement exposée à l’écran, l’angoisse d’un fils qui découvre que son père est gay, comme lui. Cette inquiétude n'a rien à voir avec la génétique, mais comme il est montré dans le film, tout à voir avec une culture qui étouffe la communication et force chacun à imiter l'apparente norme.
Mais paradoxalement les scénaristes du film (David Leavitt et Sean Mathias) peuvent aussi donner à penser que l'homosexualité est le résultat de l'environnement ET de la génétique. Elliot, l’amant de Philip, est le fils adoptif de deux hommes gays (joués par John Schlesinger et Rene Auberjonois) . Quant au père biologique de Philip, il est gay! La colocataire d’Elliot, qui est travailleur social, révèle que la vie d'un enfant dont elle étudie le cas a été  modelé par son environnement après qu’ il ait été négligé par sa mère et laissé seul des jours entiers, il a commence à imiter une grue de chantier, la seule stimulation qu’ il voyait de son lit...
On se dit que philip peut être troublé car probablement, Owen né trente ans plus tard n’aurait pas fait le même choix de vie. Il ne se serait pas marié et aurait vécu son homosexualité et n’aurait pas eu de fils...
 

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Cinématographiquement Finch abuse des panotages hésitants et surtout des scènes nocturnes en général assez mal éclairées. En revanche il a apporté une grande attention aux atmosphères sonores ce qui donnent du relief à des scènes qui sans ce traitement seraient plates. Malheureusement cet effort est abîmé par une musique trop présente et pesante qui souligne avec trop d’insistance les moments d’émotion.
Le procédé de montage parallèle, plusieur fois utilisé, qui consiste à faire alterner des actions contrastées que font au même moment les protagonistes est bien scolaire.
 

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Il y a une véritable alchimie entre les jeux de MacFadyen et de Cox. Owen cherche à comprendre ses propres sentiments en communiquant avec son fils. Les deux acteurs sont parfaits car ils connaissent bien l'art du sous-texte. Le casting réserve d’autres bonnes surprises. On y trouve John Schlesinger, le célèbre cinéaste (gay) de “Macadam cow boy”. Il interprète Derek le père adoptif d’Elliot, l’ami de Philip. Quant à Angus Macfadyen pour lequel le rôle de Philip était sa première apparition à l’écran, on l’a revu dans les derniers “Saw” et surtout depuis “The lost language of cranes” il  a joué un nombre impressionnant de personnages très variés, d’ Orson Welles à Richard Burton en passant par Hitler et Zeus! Pour ma part j’avais découvert Corey Parker, ici Elliot, dans l’excellent “Biloxi blues”.
 

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Quatre ans après “The lost language of cranes”, en 1995, Nigel Finch tournera son seul long métrage pour le cinéma “Stonewall”, malheureusement il décédera du SIDA ( comme Richard Warwick qui  est Frank dans “The lost langage of cranes”)  immédiatement après.
Petit avertissement, si vous avez gardé un secret important pour celui que vous aimé , ce film risque de vous mettre très mal à l'aise...

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Même si “The lost language of cranes est loin d’être honteux, on se dit, encore une fois qu’il est tout de même préférable de lire le roman dont est adapté le film plutôt que de voir ce dernier.
man handle being more mature than his father when it comes to love and relationships?

Un DVD  du film est édité en Grande Bretagne
 
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La langue perdue de grues 1
 
 
La langue perdue de grues 5

The Lost Language of Cranes FULL MOVIE

2 mars 2020

Nicolas Bernard Lépicié (1735-1784)

Garçon avec un livre de dessin  à l'huile sur toile, 1772  Nicolas Bernard Lépicié (1735-1784)

Garçon avec un livre de dessin à l'huile sur toile, 1772 Nicolas Bernard Lépicié (1735-1784)

 

2 mars 2020

BASKETBALL DIARIES un film de Scott Kalvert

BASKETBALL DIARIES un film de Scott Kalvert (réédition augmentée)

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USA, 100 mn, 1995

Réalisation: Scott Kalvert, scénario: Jim Caroll & Bryan Goluloff, image: David Phillips, montage: Dana Congdon, musique: Graeme Revell

avec: Leonardo Di Caprio, Mark Wahlberg, Lorraine Brasco, Juliette Lewis, Jim Caroll

 

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Résumé

Jim (Léonardo Di Caprio) et sa bande de copains (dont l’un d’eux est joué par Mark Wahlberg, la future vedette que l’on connaît ) suivent une scolarité rigide dans une école catho et traînent leur mal de vivre dans les rues de New York. Le basket, qu’ils pratiquent à un haut niveau, est leur seule passion. De dérapages en désillusions, ils vont préférer la seringue au ballon. Jim écrit son journal intime, celui d’une descente aux enfers...

 

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L’avis critique

Le film, le premier du metteur en scène (en 2002 Kalvert réalisera un autre film gay "Young rebels"), est l’adaptation d’un livre autobiographique célèbre aux USA de Jim Carroll, l’un des chefs de file de l’avant-garde new-yorkaise des années 70, proche d’Andy Warh de Lou Reed et du Velvet Underground. Ce garçon précoce publie son premier recueil de poèmes à 22 ans, Living at the movies, pour lequel il est pressenti pour le prix Pulitzer. Il publie The Basketball diaries en 1978, à l’age de 28 ans, dans lequel il racontait au jour le jour son expérience d’ado paumé, drogué, clochardisé, prostitué... Cette prostitution homosexuelle est discrètement présente dans le film dans une scène où l’on perçoit un relent d’homophobie. Ce livre, publié en France par les éditions 10/18 (n°2644), sera le livre-culte d’une partie de la jeunesse américaine; il sidérera Jack Kerouac et marquera cette jeunesse comme l’avait fait avant lui le fameux Attrape-coeur de Salinger. On peut le comparer à ce que fut en France au début des années 80 Flash (Le Livre de Poche). Pourtant le film connaîtra un échec commercial aux USA... Caroll a également commis plusieurs disques, dont Catholic Boy en 91, et on entend certaines de ses chanso√ns dans la bande originale d’E.T. A noter que Caroll a suivi le tournage du film et a même joué le rôle d’un vieux junkie dans une scène avec Di Caprio. Ce dernier, comme pour le rôle de Rimbaud, fait preuve d’un grand talent d’interprète à la tête d’une distribution homogène et talentueuse. Il donne une dimension époustouflante à ce personnage d’adolescent désespéré qui ne rêve que de devenir pur. Il faut être courageux pour accepter un tel rôle à l’aube d’une carrière; il est vrai que Basketball diaries fut tourné avant son succès titanesque... Le film n’a dû sa sortie en France,  trois ans après son tournage, qu’en raison du succès de Titanic, et c’est une chance, car il aurait été dommage de se priver de ce film bien écrit et bien joué, maisassez mollement filmé, sauf dans les scènes où intervient la musique dans lesquelles Kalvert se souvient qu’il est un bon réalisateur de clips.

Dans la lignée d’”Outsiders” de Coppola,

 

Agendas, le film
 
 
Agendas, 3
 
Diaries 2
 
Agendas 1
 
Agendas, 6
 
 
Agendas, 4
 
Agendas 5
 
 
Agendas 7

"The Basketball Diaries" trailer

 
2 mars 2020

Adam Watt photographié par Danny Lang pour Vanity ados

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