50 WAYS OF SAYING FABULOUS (50 FAÇONS DE DIRE FABULEUX) un film de Stewart Main
Fiche technique :
Avec Andrew Paterson, Harriet Beattie, Jay Collins, Michael Dorman, Georgia Mc Neil, Rima Te Wiato, Michelle O Brien, Ross Mc Kellar et Stephanie Mc Kellar.
Réalisation : Stewart Main. Scénario : Stewart Main, d’après le roman de Graeme Aitken (publié en France aux éditions 10/18, n° 3548). Images : Simon Raby. Montage : Peter Robert. Costumes : Kristy Cameron.
Nouvelle Zélande 2005, Durée : 90 mn. Disponible en VO et VOSTfr.
Résumé :
Billy Boy (Andrew Paterson), douze ans, ne s’intéresse ni aux matches de rugby ni aux travaux de la ferme dévolus aux garçons de son âge. Il échappe à sa solitude de fils unique d’une famille de fermiers de Nouvelle-Zélande, grâce à son jeu favori, se transformer en Judy Robinson, la jeune héroïne de Perdu dans l’espace, sa série télévisée préférée. Une queue de vache pour les nattes et des vêtements de sa mère en guise de combinaison spatiale et la métamorphose à ses yeux est parfaite. Il n’est plus un petit garçon enveloppé mais la belle Julie.
Un jour, il apprend que les tantouzes sont des « hommes qui portent des perruques, qui se déguisent avec des robes et… qui ont cinquante façons de dire fabuleux », fasciné qu’il est par le théâtre et les déguisements, il pense avec candeur avoir enfin trouvé son salut. Son avenir est tout tracé, quand il sera grand, il deviendra une tantouze !
Pour l’accompagner dans ses jeux il y a son inséparable “copain”, sa cousine Lou (Harriet Beattie). Mais leur indéfectible amitié va être mise en péril par l’arrivée d’un beau et jeune commis de ferme et l’apparition d’un nouveau camarade de classe de Billy qui ne laisse pas ce dernier indifférent…
Billy Boy va bientôt découvrir que le monde réel est plus violent que le monde imaginaire dans lequel il se réfugie. Tiraillé par des sentiments contradictoires et ambivalents, il va découvrir, souvent à ses dépens, la difficulté d’assumer ses différences…
L’avis critique
Si votre temps est compté, préférez à ce bon film la lecture de l’excellent livre dont il est tiré. Ce conseil est presque toujours valable en ce qui concerne les œuvres cinématographiques adaptées d’un roman. Il y a bien sûr quelques exceptions, comme par exemple Le Pont de la rivière Kwaï ou Maurice, films à mon sens supérieurs aux textes qui les ont inspiré et pourtant les ouvrages à l’origine de ces longs-métrages ne déméritent pas. Non qu’il y aurait une supériorité naturelle de la littérature sur le cinéma, vieille lune stérile, mais la principale faiblesse des films adaptés de romans vient qu’il faut environ trois heures pour faire vivre à l’écran une histoire de 200 pages, soit un tiers en plus de la durée d’un film standard qui est habituellement d’une heure trente à deux heures. Il faut donc pour l’adaptation réaliser des coupes sombres d’où les trop fameuses ellipses, figure de style qui a souvent bon dos, et le sacrifice systématique des personnages secondaires qui pourtant font souvent le sel de bien des romans et de bien des films. C’est cette dernière solution qu’a choisi le réalisateur de 5O façons de dire fabuleux, faisant perdre de la profondeur à sa narration et reléguant à l’arrière-plan le contexte social de cette Nouvelle-Zélande rurale, contexte bien développé dans le roman et si exotique pour un lecteur français.
Je ne résiste pas au plaisir de vous donner un court extrait de cet unique roman de Graeme Aitken que vous ne retrouverez pas complètement dans le film, ce qui n’est pas surprenant :
« Je n’avais pas la moindre idée de ce que j’avais fait. En tout cas cette sensation me déplaisait. Roy ne s’était quand même pas soulagé sur moi ? Je me frottai les mains avec précaution. Non, c’était trop épais et poisseux. Du sang ? J’avais peut-être trop tiré fort et fait éclater une veine dans son pénis ? Était-ce la raison pour laquelle il avait hurlé ? Pourtant il ne semblait ni souffrir ni être pressé de vérifier les dégâts. À peine s’était-il remis debout qu’il avait remballé la marchandise et remonté son jean. La seconde d’après, il avait passé la porte, sans un mot ni un regard en arrière... » Deux camarades blogueurs parlent trèsbien de ce livre: ici et là.
Le sujet est passionnant : comment naît la conscience d’être homosexuel chez un jeune garçon, avant même souvent qu’il ait connaissance du mot et surtout de ce qu’il implique. Sujet peu traité au cinéma. Il y a bien Ma vie en rose, mais c’est vu du côté des parents et assez superficiellement ; Trevor, chef d’œuvre méconnu du court-métrage, et plus souterrainement Jacquot de Nantes qui raconte l’enfance de Jacques Demy dont la bisexualité n’est pas un mystère,bien que celle-ci ne soit jamais évoquée, mais qui éclaire tout le film. C’est Agnes Varda, son épouse, qui signe cet émouvant film, sorti peu de temps après le décès du cinéaste.
Les premières images sont furieusement “camp” et le paysage somptueux, filmé d’une façon à le rendre presque idyllique ; les enfants qui l’habitent agissent de façon cruelle et parfois perverse même si le scénario édulcore beaucoup les péripéties, en particulier sexuelles, du roman.
Je m’étonne toujours qu’un cinéaste consacre autant d’énergie pour nous présenter un film dont le personnage est parfaitement antipathique. Dans ce domaine, le record est sans doute détenu à ce jour par François Ozon avec Angel, mais Billy Boy n’est pas mal non plus dans le genre « fat » aussi bien dans son sens en anglais (gras) qu’en français (suffisant), bref une parfaite tête à claques. Maisn’avons-nous pas tous été ainsi ? La suffisance enfantine n’est supportable que par les géniteurs aveuglés et les commerçants intéressés. Dans le film, Billy est encore beaucoup plus agaçant encore que dans le roman qui lui donne la chance de dépasser son âge ingrat.
5O façons de dire fabuleux est le deuxième film de Stewart Main. Le premier, Desperate Remedies a été sélectionné à « Un certain regard » au Festival de Cannes de 1993.
Pour l’anecdote, Stewart Main a écrit son scénario en Indes face à l’Himalaya, qui lui rappelait les paysages de sa Nouvelle-Zélande natale. Le film a été tourné dans le sud de l’ile à Central Otago, région où la couleur ocre domine.
Pour sa figuration, le cinéaste a utilisé les habitants de la région, ce qui confère une indéniable authenticité au film. Pour trouver les jeunes acteurs, il a été d’école en école à travers le pays durant plusieurs mois. On peut constater que son choix s’est révélé excellent. Andrew Paterson et Harriet Beattie dans les deux rôles principaux sont époustouflants de vérité. On ne peut pas dire la même chose du garçon au jeu outré qui interprète Roy.
Le DVD, sans aucun bonus malheureusement, bénéficie néanmoins de menus et d’un habillage aussi beaux qu’inventifs.
5O façons de dire fabuleux est l’habile adaptation d’un chef d’œuvre qui nous emporte loin géographiquement, tout en ravivant sans doute chez beaucoup de spectateurs des sensations de leur enfance qu’ils avaient profondément enfouies en eux.
50 Ways of Saying Fabulous Trailer (2005)
George Platt Lynes à l'Institut Kinsey
George Platt Lynes
Leaphart McCarthy
Kinsey Institute
Aujourd'hui , le travail de George Platt Lynes est bien connu, mais ce ne fut pas par un miracle. Cela est dû à une amitié, celle de George Platt Lynes et Alfred Kinsey; le photographe a donné lson fond à l'Institut Kinsey. Sans cela nous connaitrions ses photos de mode et rien d' autre, sans aucun doute que ses nus, aujourd'hui célèbres auraient largement disparu.
George Platt Lynes
Untitled (1930)
Institut Kinsey
George Platt Lynes
Untitled (1934)
Institut Kinsey
George Platt Lynes
Francis George "Kiichi" Harrison (1940)
Institut Kinsey
George Platt Lynes
Ralph McWilliams (1941)
Institut Kinsey
George Platt Lynes
Tamara Toumanova (1941)
Institut Kinsey
George Platt Lynes
Tex Smutney (1941)
Institut Kinsey
George Platt Lynes
Untitled (1943)
Institut Kinsey
George Platt Lynes
Tennessee Williams (1944)
Institut Kinsey
George Platt Lynes
Vogue (1945)
Institut Kinsey
George Platt Lynes
Sans titre (1945)
Institut Kinsey
George Platt Lynes
Igor Stravinsky (1947)
Institut Kinsey
George Platt Lynes
Vogue (1948)
Kinsey Istitute
George Platt Lynes
Vogue (1948)
Kinsey Istitute
George Platt Lynes
Maria Tallchief Firebird (1949)
Institut Kinsey
George Platt Lynes
Alfred Kinsey (1950)
Institut Kinsey
George Platt Lynes
Jean Babilée à L'Amour fils et Amour (1951)
Institut Kinsey
George Platt Lynes
Untitled (1952)
Institut Kinsey
George Platt Lynes
Autoportrait (1952)
Institut Kinsey
George Platt Lynes
Untitled (1954)
Institut Kinsey
George Platt Lynes
Untitled (1954)
Institut Kinsey
George Platt Lynes
Untitled (1955)
Institut Kinsey
George Platt Lynes
Marc Chagall / d
Kinsey Institute
EBAN AND CHARLEY, un film de James Bolton
Fiche technique :
Avec Giovanni Andrade, Brent Fellows, Ellie Nicholson, Drew Zeller, Pam Munter, Ron Upton, Nolan Chard, Deanna Alexich et Jennifer Utley.
Réalisation : James Bolton. Scénario : James Bolton. Image : Judy Irola. Montage : Elizabeth Edwards. Son : Daniel Palin. Musique : Stephin Merrit.
USA, 2001, Durée : 89 mn. Disponible en VO et VOSTfr.
Résumé :
Eban (Brent Fellows), 29 ans, ex-professeur de football, retourne dans sa ville natale pour vivre chez ses parents. Il se lie d'amitié avec Charley (Giovanni Andrade), un adolescent de 15 ans qui vient de perdre sa mère. Eban et Charley découvrent que leurs singularités dans cette petite ville côtière se ressemblent. Ils aiment tous les deux jouer de la guitare, se promener sur la plage, faire des ballades en bicyclette, discuter de poésie... Ils entreprennent peu à peu une relation amoureuse, malgré la menace du père d’Eban (Ron Upton) qui prend conscience de la situation.
L’avis critique
Avant toute chose, il faut remercier Bolton pour le courage qu’il a eu à traiter dans son premier film la relation amoureuse et sexuelle entre un garçon de 15 ans et un adulte.
Ensuite, il faut louer sa lucidité pour avoir choisi Giovanni Andrade pour le rôle de l’adolescent. Il dégage une présence incroyable à l’écran. Mais on ne pouvait se douter que le joli garçon sensible qui crève la toile deviendrait quelques années plus tard un des performers les plus en vue de la scène underground new-yorkaise et surtout un remarquable graphiste connu sous le nom de Gio Black Peter. On l'a revu au cinéma dans "Otto" en 2008.
Le choix de Brent Fellows pour interpréter Eban est judicieux. Bolton n’a pas fait l’erreur de le choisir trop beau. Avec son physique ingrat et son attitude un peu fuyante, Eban n’obtient pas d’emblée la sympathie du spectateur ; au début, on le perçoit même comme un prédateur. Il la conquiert in fine parce que l’on s’aperçoit qu’il est un garçon fragile, un peu perdu et qu’il n’y a pas que le corps de Charley qui tente Eban…mais qu’il est véritablement amoureux du garçon.
Au fil du film, on découvre que le plus mature n’est pas l’aîné mais le plus jeune des garçons. Cette inversion des rôles est la grande idée du scénario.
Bolton a fait de nombreux choix heureux pour son scénario, comme celui de faire de Charley un garçon qui ne semble pas avoir une inclinaison sexuelle avant sa rencontre avec Eban. Cela semble être la première fois pour lui. Eban a un passé qui est moins gratifiant. Eban semble aussi un peu "bête", ne réalisant pas complètement ce qu’il se passe pour lui. Il semble souvent incapable de s'exprimer en adulte et de justifier ses actes et ses sentiments.
Le rythme du film est lent. On partage avec les deux amoureux d’heureux moments de leur quotidien. Pourtant, jamais on ne s’ennuie, tant on sent qu’une terrible menace plane au-dessus de ce bonheur simple.
Eban & Charley, s’il n’est en aucun cas un film militant (ni les protagonistes ni leur relation ne sont idéalisés) est néanmoins un film moralement important car il déculpabilise les relations intergénérationnelles pour ceux qui ont vécu une telle expérience qui, aujourd’hui, sont stigmatisées par la société, peut-être comme jamais elles ne l’ont été.
Eban & Charley a été un des premiers films tournés en numérique, d’abord pour des raisons d’économie mais aussi parce que la caméra numérique permet d’être plus près des acteurs et est idéale pour filmer les scènes intimistes. D’autre part, elle est moins intimidante pour des acteurs débutants comme l’étaient ceux du film. En outre, elle permet une plus grande liberté de déplacement aux acteurs : c’était donc un très bon choix. Bolton était aussi très tenté par les principes du « Dogme » qui, alors, connaissaient une certaine vogue. Mais si le label « Dogme » lui aurait valu quelques subsides supplémentaires, il l’aurait privé de la musique qui est très belle. La B.O. a connu un succès bien supérieur à celui du film ; elle tient une place essentielle dans Eban & Charley.
L’image est presque toujours belle. Les scènes d’extérieur sont les plus réussies et c’est très bonne idée d’avoir situé cette histoire dans un petit port de pêche pittoresque (le film a été tourné dans l’Oregon). On décèle cependant quelques erreurs de lumières dans les scènes d’intérieur, ainsi que quelques faux raccords.
Quelques approximations scénaristiques nuisent également à la crédibilité de l’entreprise. Le plus gros défaut du scripte est celui d’avoir voulu ramasser la relation d’Eban et Charley dans la durée des vacances scolaires. Ce qui n’est guère crédible et est en contradiction avec le rythme lent du film qui montre bien comment chacun, petit à petit, s’apprivoise. On comprend bien qu’ainsi Bolton a voulu échapper (en particulier) aux incontournables scènes de collège qui sont coûteuses en figuration et difficiles à régler. Mais en cinéma, la facilité est presque toujours ennemie de la vérité.
Dans le montage final Bolton, timoré, n’a pas retenu la seule scène qui montrait de façon explicite que les deux amoureux avaient des relations sexuelles. Lorsque j’ai édité le film en DVD en France (Eklipse), j’ai demandé au réalisateur les scènes coupées pour les faire figurer en bonus dans le DVD. J’ai ainsi découvert cette scène et l’ai ajoutée dans mon édition malgré les réticences du réalisateur. L’édition française, aujourd’hui épuisée, est la seule à la posséder.
Avant Eban & Charley, Bolton avait réalisé un premier court-métrage, Growing Up, tourné alors qu’il était encore adolescent, qui raconte l'histoire de deux amis dans les rues de Los Angeles. Le film a été projeté dans de nombreux festivals à travers le monde et a donné à Bolton la réputation d'un cinéaste contestataire. Depuis il a réalisé "The graffiti artist" en 2004 et "Dream Boy" en 2008.
Eban et Charley est un film courageux et original qui parvient, malgré quelques facilités et son petit budget, à nous émouvoir et à s’inscrire durablement dans notre mémoire.
Eban and Charley Trailer
POUR UN SOLDAT PERDU de Roeland Kerbosch
Hollande, 92 mn, 1992
Si le film n’est pas un parfait chef-d’oeuvre, c’est à cause de la séquence initiale où l’on voit Rudi van Dantzig adulte, joué par l’américano-hollandais Jeroen Krabbe (l’acteur fétiche des débuts de Paul Verhoeven), chorégraphe faisant répéter par de jeunes danseurs, absolument splendides dans leur collant brillant, un ballet commémoratif de la libération. Cette entrée en matière n’est pas complètement convaincante et surtout ne s’intègre pas avec le reste du film. Mais aussitôt que “Pour un soldat perdu” revient quarante ans en arrière, il devient beaucoup plus vivant. Nous découvrons le garçon de douze ans fourré dans un camion, à l’aube, avec d’autres enfants, inquiets d’être séparés de leurs parents. Puis nous le voyons s’adapter lentement à sa nouvelle famille, à la fois simple et profondément religieuse, comprendre et apprendre peu à peu la langue frisonne. Les canadiens libèrent la Frise. Le garçon attire l’attention d’un soldat de cette armée; flirter avec lui, en tomber amoureux, devenir son amant, et avec angoisse, le perdre quand partent les troupes. Le jeune interprète, Maarten Smit est parfait. Son visage est non seulement beau, mais surtout remarquablement expressif, le rôle demande une grande variété d’humeurs. Lors d’une interview télévisée en 1992, il a alors quatorze ans, il déclara que pleurer ne lui posa aucun problème, il n’avait qu’à imaginer sa mère en train de mourir, rire lui fut plus difficile, il pensait que son rire était faux et que cela le faisait trembler à chaque fois. Autocritique injustifiée, le garçon est toujours très naturel dans la peau de son personnage.
Andrea Kelby est convaincant dans le rôle charismatique et quelque peu énigmatique du soldat canadien, caché derrière ses lunettes noires, qui au milieu des incertitudes de la guerre, est capable de s’abandonner émotionellement au garçon, comme Jeroen s’abandonne au soldat. Andrea Kelby forme un excellent contraste avec la fraîcheur du jeune Smit à la présence magnétique.
“Pour un soldat perdu” magnifiquement joué et réalisé célèbre la découverte de l’amour. Avec optimisme, ce film ne dit rien d’autre que la découverte de l’amour physique, même à treize ans, peut-être une belle chose. Le fait que les deux protagonistes soient du même sexe et d’age différent ne semble pas être le plus important, mais que l’essentiel est dans la simplicité d’âme du soldat et du garçon. ”Pour un soldat perdu” est un film lumineux.
For A Lost Soldier - Love (Gay Themed)
Commentaires lors de la première parution du billet
Posté par Yvon Verrier, 22 juin 2010 à 08:09