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Dans les diagonales du temps
13 juillet 2021

Imposture de Claude Michel Cluny

Impostures_L_invention_du_temps_tome_3

 

 

 

Dans ce troisième tome de son journal, Claude Michel Cluny a presque trouvé la forme qui sera dorénavant celle de « L’invention du temps ». Il s’y glisse encore quelques impuretés comme ce développement sur la peinture de Klee ou un reportage sur le tournage des Comtes de Canterbury de Pasolini qui sont des articles refusés par deux des nombreuses revues et journaux auxquels C.M.C. collaborait entre 1968 et 1973 qui sont les années que couvre « Imposture ».

Si les différents volumes de « L’invention du temps » forment un tout, néanmoins chacun a sa spécificité. Dans « Imposture » on découvre C.M.C. amoureux ou plus exactement un homme qui avoue de l’être et, qui, contrairement à son antienne sur la solitude, envisage une vie commune avec l’objet de son amour, Beto, un jeune homme brésilien, mais leur idylles va être contrariée par des contingences administrative.

En moraliste, C.M.C parle de l’amour qu’ii pratique: << Nous donnons à un adolescent ce qu’il y a de meilleur en nous, et peut ¨être il gardera longtemps longtemps tel un don secret. Ce que lui nous aura donné, si pure et si belle soit cette offrande, les années en éteindront le feu sans effacer sa lumière; elles appelleront avec une insistance panique à en retrouver la grâce dans un autre garçon, la flamme du dieu passant de l’un à l’autre.>> et aussi: << J’ai toujours eu peur de ce que le temps allait faire de moi et de ceux que j’avais aimés, ou que j’aimais.>>.

A ses habituels considérations géopolitique dont beaucoup ont trait au conflit israélo-palestinien, les sympathies de l’auteur vont nettement aux palestiniens, s’ajoute un témoignage de première mains, même s’il est comme toujours chez C.M.C. distancié, des évènements  de mai 68. Si au début il éprouve de la sympathie pour le mouvement étudiant, en fait il s’insurge surtout contre les brutalités policières, bien vite il fustige la chienlit et s’inquiète des dégâts infligés aux institutions chargées de la transmission des savoirs. Il n’est pas pour autant tendre pour le pouvoir gaulliste et en particulier pour Georges Pompidou.

Comme dans chaque tome les pérégrinations de l’auteur, souvent dont le prétexte (et le financement) a pour source ses travaux autour du cinématographe, occupent une large place mais on aurait aimé qu’il s’attardât plus sur sa visite de Ceylan. Autre découverte pour C.M.C. celle de l’Afrique noir qui l’inspire peu: << C’est un monde pour moi dépourvu d’affinités esthétiques, érotiques ou culinaires.>>. De l’éternel voyageur qu’il est, il fait un autoportrait (prémonitoire ?) en parlant de Voltaire << Il est de ces migrateurs, de ces pérégrins dont le lieu de prédilection est toujours ailleurs; lorsque l’âge et les circonstances les clouent quelque part ils ne posent pas leur sac, ils le vident.>>.

C.M.C est avant tout un méditerranéen de coeur. Sur ces rivages, il se gorge de soleil et conforte son paganisme: << Marc-Aurèle, l’empereur raisonnable harcelé par les chrétiens, une nuée de taons acharnés à nuire, à tuer l’idée même du bonheur.>>.

Comme à l’accoutumé on a droit à des portraits express et vachard de quelques un de ses contemporains ou plus anciens de la république des lettres: << Saint-Simon qui me parut immense et embroussaillé, une savane hantée par des fauves à perruque.>> ou encore ce trait cruel, que je ne partage pas: << Ce pauvre Modiano, décidément: une cruche emplie d’eau triste.>> et cette connotation désabusée sur l’édition: << Confondre édition et littérature, et croire que les auteur couronnés par les prix sont à coup sûr des écrivains? Balivernes. Quelques uns le sont ou le deviennent, mais les prix remplissent une vitrine, pas une mémoire.>>.

L’amitié comme toujours tient une grande place dans le journal, dans « Imposture » c’est surtout celle avec Jean-Louis Bory. C.M.C. est d’un enthousiasme mitigé pour « La peu des zèbres » roman que Bory vient de faire paraitre. Il est plus laudateur pour « Printemps au parking » de Christian Rochefort.

Au détour d’un paragraphe, le poète qu’est l’auteur surgit: <<Grand vent et pluie: les rues jonchées d’une race industrielle de chauves-souris abattus, les parapluies morts.>> 

 

Pour retrouver Claude Michel Cluny sur le blog:

 

 

 

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Commentaires
B
Printemps au Parking...CMC dit, je crois, avoir été conseiller technique pour Christiane Rochefort....<br /> <br /> Merci pour cette belle recension.<br /> <br /> Merci pour vos billets
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