Ramasseurs de balles, Roland Garros 1984
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Voici une exposition où je ne serais probablement pas allé si je n’avais pas reçu l’invitation pour son vernissage (merci Christine) et j’aurais eu bien tord tant elle est riche d’enseignement. Oublions son titre à mon sens inutilement provocateur, bien qu’au risque de passer pour un philistin, je dois confesser que je goûte peu, en général les oeuvres de Rodin dont j’ai pourtant souvent fréquenté le jardin de son musée celui-ci n’étant naguère peu éloigné de mon domicile et offrant un des plus bel oasis de verdure de la capitale. Intéressons nous plus au sous-titre de l’exposition, à la fois modeste et éclairant: “La sculpture à Paris, 1905-1914. Il ne faudrait pas croire que l’exposition ne couvre que la production française, c’est même tout le contraire. Mais Paris était alors le carrefour où se rencontraient les artistes du monde entier.
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Contrairement à se qui est présenté habituellement l’exposition ne met pas en avant les conflits entre les différentes écoles ou artistes, cubisme contre académisme par exemple, mais veut être le miroir de l’ effervescence et du renouveau qui travaillaient au début du XX ème siècle la sculpture européenne. Elle se réfère en cela à la salle de l’Armory Show à New York en 1913 où l’on pouvait voir côte à côte des oeuvres de Maillol, Archipenko, Joseph Bernard et Wilhelm Lehmbruck.
Archipenko.
La manifestation se déroule en un emplacement inhabituel pour les expositions temporaires du Musée d’Orsay, sur la mezzanine qui surplombe la grande salle du rez de chaussée où sont mises en valeur plusieurs statues de la deuxième moitié du XIX éme siècle, qui juchées sur de haute colonne, dominent le visiteur, lorsque de l’entrée, il s’avance dans cette vaste nef dans laquelle, l’observateur sagace remarquera quelques traces persistantes de son ancienne attribution ferroviaire.
L’exposition, dans un parcours quelque peu méandrique, les salles sont parfois un peu petites pour les sculptures exposée, nous montre chronologiquement comment les artistes, à partir de 1900, se sont éloignés de l’influence de Rodin. Dans la première salle on ne voit guère de différence entre les oeuvres de Rodin qui y sont présentées et les artistes qui dans toute l’Europe le copie. Mais bientôt les recherches des sculpteurs, chacun par une voie qui lui est propre, vont s’éloigner des formes du maître, certains par un retour au néo classique, comme Joseph Bernard , ici avec notamment son admirable “Jeune fille à la cruche” (on peut voir de nombreuses oeuvres de cet artiste à une adresse méconnue, La Fondation de Coubertin à Saint-Rémy les chevreuse près de Paris);
Joseph Bernard
... d’autres par une simplification des formes. Cette direction en mèneront certains jusqu’à l’abstraction tel Brancusi qui est représenté au début de l’exposition par une œuvre d’inspiration rodinienne, “La prière” bien loin de la “Muse endormie” que l’on pourra admirer plus loin. Une des surprises, pour ma part, a été de constater l’emprise qu’avait Rodin sur la pratique de ses confrères, emprise dont beaucoup peineront à se libérer.
La prière de Brancusi
La Méditérranée de Maillol
Elie Nadelman
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D’autres encore chercheront dans la nature à la fois une inspiration et un modèle pour architecturer leur travail. C’est le cas de Bourdelle, de Despiau (malheureusement peu représenté ici) et dans une optique encore différente de Maillol.
De nombreux créateurs regardent au dessus des mers pour féconder leur inspiration. Picasso qui a été amené à la sculpture par Gonzales regarde du coté de l’art africain tandis que Pompon revendique l’héritage antique mais du coté de l’Egypte...
Les recherches de la forme pure conduisent la main d’Archipenko dont on aurait aimé voir plus de pièces.
Dans la seconde salle j’ai été particulièrement sensible au “Jeune homme debout” de De Fiori qui semble être figé dans une transe lascive.
Le jeune homme debout de De Fiori
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Je suis toujours heureux lorsqu’une exposition me donne l’occasion de plusieurs, ou même d’une découverte, de compléter mon maigre savoir en matière d’art, et si possible, ainsi d’éprouver des bonheurs inédits. Dans cette exposition elles furent nombreuses les opportunités d’apprendre et de jouir de nouvelles beautés jusqu’à présent ignorées de moi.
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On peut y voir aussi malheureusement chez les artistes comme dans toutes les catégories de la population, que la Grande Guerre a fauché certains des meilleurs comme Henri Gaudier-Brzeska et Raymond Duchamp-Villon...
Les sculptures du belge Minne possèdent à la fois une certaine sensualité comme “L’enfant prodigue” dont le corps arqué en arrière semble implorer un ciel vide mais aussi une gravité un peu intimidante comme ce porteur de reliques...
L'enfant prodigue et le porteur de relique de George Minne
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Mais en ce qui me concerne, la véritable révélation est Wilhelm Lehmbruck dont on peut voir de nombreuses statues qui méritent toutes que l’on s’y arrête.
Wilhelm Lehmbruck
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Une fois débarrassé de l’influence de Rodin, ce qui semble préoccuper cet artiste allemand singulier c’est d’abord la gestuelle de ses sujets. En accentuant le volume des articulations de ses modèles comme dans “le jeune homme s’élevant”, il engendre des gestes anguleux qui renforcent le tragique des poses, tragique qui ira crescendo jusqu’ à la détresse du "jeune homme assis" et surtout au "prostré", sa dernière création avant son suicide en 1919.
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Il n’est pas utile d’être un grand connaisseur en art pour s’apercevoir tout ce qu’Arno Breker doit à Lehmbruck comme le démontre bien la photo ci-dessus, prise lors d’une exposition américaine sur la statuaire allemande au XX ème siècle, dans laquelle on voit côte à côte "le guerrier blessé" de Breker et "le jeune homme assis" de Lehmbruck. Tout aussi flagrant est la parenté entre "le jeune homme s’élevant" et le porteur de glaive. On s’aperçoit que les deux artistes ont tendance à sur dimensionner les membres et les mains et à sous dimensionner la tête.
Bien évidemment on ne trouvera aucune mention d’Arno Breker dans l’exposition parisienne. Breker est toujours un artiste paria...
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Sur le mur de la salle dans laquelle sont exposées les sculptures déchirantes de Lehmbruck, pour lesquelles on ne doit pas rater cette exposition, on peut lire cet émouvant appel de l’artiste, rédigé durant la dernière année de sa vie: << Mes mains implorent dans la nuit noires. Elles s’élèvent et cherchent dans les ténèbres, dans le néant, il doit bien y avoir une lumière au delà de la nuit. Mes mains se tendent et supplient et vacillent et tâtonnent alentour, elles voudraient trouver quelque chose dans l’obscurité, le saisir, le tenir. Elles agrippent et cherchent et ne rencontrent rien, elles étreignent le néant et les ténèbres.>>.
Paris, mars 2009
Avant de dire adieu à notre bel hôtel, le Serengeti sopa lodge, je respire à fond l’arôme des buissons fleuris qui bordent et embaument l’allée qui conduit aux chambres. Au milieu un lézard semblable à celui que j’ai photographié hier, déjà se prélasse au soleil levant. Depuis j’ai appris que ce ne pouvait être qu’un mâle de l’espèce des agames des colons ou margouillat, car les femelles n’ont que de ternes couleurs. Mais le plus curieux est que monsieur lézard durant la nuit perd sa chatoyance pour devenir aussi triste que sa dame mais dès l’aube il quitte son abri nocturne pour venir se chauffer au soleil et en quelques minutes il retrouve sa splendeur.
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Au départ ce matin je suis un peu plus excité qu’à l’habitude puisque nous nous dirigeons vers le Ngoro Ngoro pour un safari à l’intérieur de la caldeira du volcan. C’est un peu la raison de mon retour au Afrique de l’est tant avec Jean-Claude Farjas nous avions discuté de ce voyage qu’en définitive nous ne fiment malheureusement pas. Pendant toute cette journée son souvenir m’accompagnera...
Dés notre départ sur ce chemin que nous avons déjà empreinté hier, nous rencontrons une petite troupe d’élands du cap. C’est la plus grande antilope du monde et quelques centaines de mètres plus loin c’est la plus petite des antilopes que nous surprenons, un dik dik qui n’est guère plus gros qu’un lièvre alors que l’éland à la taille d’un petit cheval...
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Nous repassons le petit pont que nous avions pris hier, près duquel des braves hippopotames macèrent toujours dans leur brouet fétide.
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Puis c’est le tour des oiseaux de se faire admirer, tout d’abord un couple de serpentaires tout près de la piste, idéal pour les photos puis nous voyons des grues couronnées.
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De bons gros zèbres ( existe t-il des zèbres maigres? ) bordent la route. Ils sont surveillés d’abord par des hyènes et, caché dans les herbes, par un guépard qui se hausse du col pour scruter son futur repas.
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Insensiblement nous passons de la savane à un désert de pierres. Brusquement notre chauffeur, qui ne nous avait pas habitué à de telles exentricités quitte la piste pour s'enfoncer à bonne vitesse dans cette plaine caillouteuse où toute trace de chemin a disparu. comment peut il se reconnaitre? Mais bientôt nous arrivons au petit musée du site préhistorique d’Olduvai qui est situé juste au bord de la gorge d'Olduvai, face à un curieux piton rocheux qui fait du lieu un décor de western.
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Dans ce modeste petit musée, nous est raconté, en images, puis par les commentaires d’un charmant et érudit gardien, les extraordinaires découvertes d’un couple d’archéologues anglais Louis et Mary Leakey qui ont voué leur vie à ce site qu’ils ont fouillé du début des années trente à la fin des années soixante dix.
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En 1959, ils découvrent les restes fossiles d’un homididé, daté 1,8 million d’années du genre “australopithèque bosei”. Ses grosses dents font penser qu’il se serait nourri surtout de végétaux. Il aurait disparu, il y a un million d’années. En 1960 les Leakey découvrent les restes d’un autre hominidé vieux de 1,75 million d’années qui serait un “homo habilis” un hominidé plus petit mais au cerveau plus volumineux appartenant à la branche de l’évolution dont l’homme descend. En 1979 après la mort de Louis Leakey, Mary Leakey et l’archéologue américain Tim White font une immense découverte à Laetoli, à cinquante kilomètre d’Olduvai, des ossements fossilisés mais surtout , imprimé sur un sentier couvert de cendres volcaniques détrempées puis séchées de 27 métres de long, 59 pas humains, les empreintes d’un couple accompagné d’un enfant qui vivait il y a quatre millions d’années. Ces êtres mesuraient environ 1,30 mètre et appartiendraient à une espèce encore plus ancienne, l’autralopithèque afarensis (la célèbre Lucy appartient à ce groupe). On voit le moulage de ces pas dans le musée. L'interprétation de ces traces divisent les spécialistes, s'agissait-il d'une bipédie bien installée ou occasionnelle, comme celle propre à certains grands singes?
En février 2009 dans la revue "Science" était annoncé la découverte de traces, les plus anciennes (?) de bipédie "moderne". Elles ont été découverte un peu plus au nord ouest que celles de Laetoli, à Ileret au Kenya, non loin du lac Turkana. Elles sont imprimées dans deux couches sédimentaires vieille de 1,51 à 1,53 million d'années. Elles sont semblables à celles de l'homo sapien. Elles témoigneraient du déplacement paisible de trois individus, deux adultes et un enfant. La taille des adultes aurait été de 1,75m et d'un peu moins d'un mètre pour celle de l'enfant .
En 1995 une équipe américano tanzanienne a découvert un squelette complet d’homo habilis. On voit également dans le musée des ossements d'animaux préhistoriques les ancètres des buffles, des éléphant et des antilopes que nous venons de croiser.
A quelqes kilomètres du musée nous croisons quelques girafes dans un lieu pourtant encore bien aride. Petit à petit le sol reverdit. Aux abords du cratère la route surplombe plusieurs villages masais. Leurs habitants ont le privilège de pouvoir faire paitre leurs troupeaux au fond de la caldeira où nous nous apprètons à descendre.
Kenya, janvier 2009
D'autres images du Kenya:
Janet et Anne Johnstone, sœurs jumelles qui ont travaillé ensemble toute leur vie à illustrer des livres pour enfants. Ici elle se mette au service d'un livre d'Enid Blyton assez atypique en regard de ses autres ouvrages, mais Tales of Long Ago par Enid Blyton est un livre qui reprend des mythes et des légendes qui sont principalement grecques mais qui incluent également d'autre conte comme Aladdin.
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Parfois il arrive dans des ventes des objets particulièrement rare dont on ignore à peu près tout et notamment leur utilisation comme ce coffret à estampe contenant une image de Saint Sébastien, dont on ne connaît environ que de quatre vingts exemplaires. Si ces petites boites d'environ 30 cm x 20 x 10 se ressemblent toutes, elles ne contiennent pas toutes la même image. Elles sont aussi appelées coffrets de messager. Elle furent toutes réalisées sur une période relativement courte entre 1485 et 1530, cette production serait essentiellement parisienne et aurait vu le jour dans l'entourage du maître des "Très petites heures d'Anne de Bretagne", artiste majeur de l'époque puisqu'il serait à l'origine du carton de la tenture de "La dame à la licorne et de cette interprétation du martyre de saint Sébastien. Elles ont été fabriquées par des orfèvres. Elles sont composées d'une âme en bois renforcée par des bandes de fer. Elles ne sont donc pas étanches et donc pas vraiment faites pour les chevauchées sous la pluie, même si leur attache latérale permet de passer des courroies rendant donc l'objet facile à transporter et à arrimer sur un cheval. Et si elles n'étaient que les écrins de l'image qui est contenue à l'intérieur et ne serviraient pas à transporter d'autres choses, ni livres ni documents, et seraient des sortes de retables portatifs en somme... En parlant de somme celui-ci a atteint 41000 €.