A propos de 1984 de George Orwell
Le plaisir des cadeaux d’anniversaire diminue un peu la tristesse du constat que chaque année cette date nous rappelle qu’inexorablement nous nous rapprochons du gouffre. Cette année, il y avait, parmi eux, le volume de La Pléiade des oeuvres de George Orwell. Je me suis précipité sur les pages consacrées à « 1984 » pour voir si une nouvelle lecture de ce roman abolirait la forte impression que m’avait provoqué ce livre lorsque, vers la quinzième année, je l’avais découvert, dans son édition dans le livre de poche, que je possède toujours, un été, le ventre sur le sable. J’étais alors un lecteur aussi avide qu’enthousiaste. Il faut bien que l’admette, je suis aujourd’hui moins avide et moins enthousiaste.
Petit rappel de la trame de 1984: Winston Smith, 39 ans est employé du ministère de la vérité. Il est chargé d’adapter les archives (le passé) selon la vérité du moment, vérité continuellement fluctuante. Sa défiance va croissant envers cette falsification de la réalité à laquelle il contribue au quotidien. Malgré la surveillance constante du régime dirigé par Big Brother, Winston décide d’écrire un journal intime dans lequel il consignera les faits réels. C’est en l’écrivant qu’il se découvrira contestataire…
La première surprise pour cette nouvelle lecture fut de ne pas retrouver « Big Brother » qui, dans la nouvelle traduction de Philippe Joworski devient Grand Frère; ce qui est certes, on ne peut plus littéral. Dans mon édition de poche Big Brother n’était pas traduit. Le traducteur, d’alors, entre autres, je suppose, n’avait pas considéré les deux mots comme des noms communs mais que cette association, dans le cas présent, était le nom d’un personnage. Je crois que c’était le bon choix. En effet Grand Frère, en français, dans son acceptation actuelle induit l’idée de bienveillance protectrice; ce qui n’est vraiment pas le cas du dirigeant du système politique qui règne dans cet uchronique « 1984 ». Peut être qu’il aurait été plus judicieux pour Orwell de nommer son tyran, ou plutôt l’image de celui-ci qui figure le régime, Big Father. Mais l’auteur a sans doute écarté une telle éventualité car elle aurait encore plus imposé le fait que « 1984 » serait uniquement une charge contre le régime stalinien car alors le lecteur aurait immanquablement pensé au surnom de Staline: le petit père des peuples. Orwell voulait étendre son propos à tout les totalitarisme.
George Steiner dans son article qu’il consacre en 1984 dans le New-Yorker au roman d’Orwell, écrit:
Retenant surtout cette phrase: "Sans nous autres", "1984" dans la forme que nous lui connaissons n’existerait tout simplement pas.
J’ai voulu avoir ma propre opinion et je me suis donc procuré le livre de Zamiatine; ce qui extrêmement facile et pour un vil prix sur la toile. Je reviendrai plus loin sur le roman de Zamiatine mais d’abord un petite incise. La lecture d’un livre, un peu consistant devrait toujours en conduire à d’autres c’est ainsi que ce forme la connaissance et le gout, en un mot la culture. Un livre lu ne doit pas resté orphelin. Il doit appeler à la découverte d’autres.
Le volume dans lequel j'ai découvert le roman d'Orwell
C’est d’ailleurs à la suite de la lecture « Du meilleur des mondes » d’Adous Huxley que j’avais été âme né à lire « 1984 ». Ce souvenir me conduit à faire une deuxième incise que je pourrais titrer: les fluctuance de la postérité. Si Orwell est aujourd’hui en haut de l’affiche, lorsque j’ai découvert son roman, au milieu des années 60, période qui génère de nos jours tant de nostalgie, pas toujours justifiée, l’utopie politique qui faisait fureur était « Le meilleur des mondes ». A l’époque j’étais lycéen et j’avais le chance d’avoir un professeur qui nous avait parlé d’Huxley et de son livre. D’autre part en ce temps là je faisais mes devoirs au son de l’émission de Michel Lancelot, « Campus » qui s’intéressait beaucoup aux paradis artificiel et par ce biais à Huxley et comme en plus dans mon adolescence j’étais friand de science-fiction, cela faisait bien des convergence pour que je me plonge dans « Le meilleur des mondes » Si certains de mes professeurs étaient éclairés, leur éclairage était tout de même limité. Presque tous étaient des marxistes de stricte obédience, il était donc inconcevable qu’ils citent même le nom d’Orwell (idem pour celui de Koestler) alors toujours en but aux calomnies féroces éructées par les intellectuels de gauche. Ceux-ci ayant mis sous tutelle l’enseignement en France. C’était donc par un camarade ou par l’émission de radio précédemment citée que j’avais eu vent de l’existence de « 1984 ». A contrario, il y a quelques temps je m’entretenais avec un garçon de 16 ans, également grand lecteur, même si cette espèce est en voie de disparition il en existe encore quelques uns, qui s’il connaissait et avait lu « 1984 » n’avait jamais entendu parler du « Meilleur des mondes »! On voit par là l’évolution de la notoriété d’un auteur et les effets des contingences idéologiques sur celle-ci.
Mon livre de poche du Meilleur des mondes lu vers 1965
En quelque sorte, « 1984 » a été écrit contre « Le meilleur des mondes » qu’Orwell qualifiait curieusement d’utopie hédoniste. Huxley après avoir lu « 1984 » écrit à Orwell pour lui dire qu’il ne partage pas son pessimisme.
Dans « Nous autres », Eugène Zamiatineimagine une civilisation futuriste, régie par un individu, prénommé le Bienfaiteur, dans laquelle chaque être est numéroté et évolue au même rythme, selon un schéma bien précis qui est celui de la raison. C'est elle qui gouverne l'ensemble des agissements de la population, ne laissant aucune place au libre arbitre ni à l'imagination. D-503, le narrateur, est homme de 32 ans, citoyen sans histoires et sans rêves, jusqu'au jour où il fait la connaissance de I-330, une femme différente des autres, qui suscite en lui un sentiment d'indignation mêlé de fascination. D-503 est chargé de diriger la construction de l'Intégral, un vaisseau spatial destiné à fédérer le reste de l'univers autour de cette société idéale, dans laquelle règne le bonheur et l'harmonie.
Mais « Nous d’eux » n’est pas la seule influence d’Orwell. On peut bien sur citer « Le meilleur des mondes » d’Aldous Huxley. On peut considérer que 1984 a été écrit contre le roman d’Huxley. Voyons la chronologie des parutions. 1984 parait à Londres en juin 1949. Nous autres de Zamiatine est écrit en 1920. Il est édité en anglais en 1924. Orwell fait une recension de « Nous autres » en janvier 1946 pour « La Tribune » et cela d’après l’édition française mais qu’il a très bien pu avoir en main bien avant puisqu’elle est paru chez Gallimard en 1929.
Essayons un peu à l’exercice redoutable qu’est la littérature comparée. « Sans nous autres » a exactement la même trame narrative que « 1984 », pour le dire plus simplement c’est la même histoire. De surcroit Orwell a utilisé le même artifice littéraire que Zamiatine. Dans les deux cas le lecteur apprend les péripétie du héros et surtout les particularités du monde qui les entoure par le biais d’un journal intime. La seule différence sur ce point entre les deux oeuvres est que Zamiatine a maintenu ce procédé jusqu’à la fin de son roman.
Portrait de Ievgueni Zamiatine par Boris Koustodiev, 1923.
Si l’on ramène l’intrigue à l’os, en faisant fi du décorum qui justement fait obstacle à sa claire vision. On se rend compte que le Pitch de « 1984 » et de « Nous autres » est le même. Il est extrêmement banal, en particulier à l’époque de leur écriture: Une femme fatale, dans la plus stricte acceptation du terme, va conduire un homme honnête mais faible vers la déchéance absolue. On pense alors à maints romans noirs presque contemporains aux deux romans comme ceux de James Cain ou de James Hadley Chase par exemple.
Les similitudes entre les deux romans ne se bornent pas à celle du Pitch. On retrouve bien des éléments communs dans les deux ouvrages comme les appartements dans lesquels les amants clandestins se livrent à leurs ébats amoureux. Les lieux dans chacun des deux romans reflètent le mode de vie du monde ancien, avant celui de la société où ils vivent.
Les deux livres sont des romans d’anticipation, là encore au sens strict du terme puisque qu’aujourd’hui nous savons qu’ils ont décrit partiellement et bien sur transposé, ce qui s’est réellement passé dans notre Histoire. Il est stupéfiant et d’une clairvoyance quasi unique qu’en 1920, Zamiatine ait pu avoir la vision des mécanismes du stalinisme. L’écrivain russe a eu la prescience que l’URSS se fermerait sur elle-même, tout en étant expansionniste. Dans l’univers imaginer par Zamiatine la société construit un véhicule spatial dans le but d’exporter son modèle sur les autres planètes du système solaire et en même temps sur la terre est une unique cité fermée sur l’extérieur et protégée par des mur de ce mystérieux verre constituant toutes les constructions de cette civilisation. Quant à Orwell sa voyance est plus modeste mais plus précise. Dans la troisième partie de son livre il décrit par le menu les procédés de tortures psychologiques de la Guépéou et cela 20 ans avant « L’aveu » de London. Il s’est certes inspiré pour cette troisième partie de « Zéro et l’infini » de Koestler Orwell a eu le rare « privilège » pour un intellectuel occidental d’être témoin (il aurait pu en être une victime) de la mise en place à Barcelone en mai-juin 1937 lorsqu’il s’était engagé dans les milice du POUM, d’une version locale du système policier soviétique. En 1942 il écrit: << C’est en Espagne que pour la première fois j’ai lu des articles de journaux qui n’avaient aucun rapport avec les faits, pas même le genre de rapport que suppose encore un mensonge ordinaire.>>. Le substrat de 1984 est la guerre d’Espagne comme le substrat du « Meilleur des mondes » est les discutions qu’Aldous Huxley avait eu avec son frère Julian Huxley grand biologiste et théoricien de l’eugénisme.
« 1984 » est plus une uchronie qu’une anticipation même si l’on ne peut pas y trouver un point précis de divergence avec notre Histoire.
La similitude des deux romans ne veut pas dire qu’il n’y a pas de différences entre eux. L’excellente idée d’Orwell a été de préempter une année, 1984, pour situer son action dans un avenir relativement proche par rapport à la date de la parution de son livre, seulement 25 ans les séparent; si bien que beaucoup des personnes découvrant le roman dès sa parution pouvaient espérer connaitre cette désormais fameuse année 1984 ainsi l’empathie avec Winston Smith en est facilité. Autre fait qui aide le lecteur, surtout anglais » à se sentir proche du héros est le fait que l’action soit précisément située dans Londres et sa banlieue. Cette situation dans un temps proche et un lieu connu est donc facilement imaginable et le fait qu’on pouvait craindre de vivre n’a pas été pour rien dans le succès commercial du livre et cela encore plus lorsque cette année 1984 a été atteinte. C’est d’ailleurs ce que constate Steiner dans son article du Newyorker. Alors que Zamiatine situe « Nous autres » dans un très lointain avenir, plus de mille ans après notre époque. Cette différence a changé d’emblée le regard porté sur les deux oeuvres. La proximité temporelle de 1984 l’a immédiatement mis dans la mouvance des dénonciations du régime soviétique dont alors le livre phare est « Zéro et l’infini » (expression que l’on retrouve dans « Nous autres » de Zamiatine) que Koestler avait fait paraitre à Londres en 1945. Koestler et Orwell étaient amis. Le second passera deux semaines chez le premier, juste avant de commencer la rédaction de « 1984 ». L’expérience d’Orwell et de Koestler de la guerre d’Espagne, qui les avait fait tout deux se déciller sur le régime soviétique, n’est pas étrangère non plus au rapprochement que l’on fait de leurs deux romans. Tandis que le futur lointain dans lequel se déroule « Nous autres » avait fait situer le roman au coté de ceux de Wells dont par ailleurs Orwell connaissait bien l’oeuvre. A propos de cette proximité temporelle, dans ce type de roman, je ne vois que « Le procès contre l’Amérique » que l’on puisse rapproché de « 1984 ».
On peut dire que « 1984 » est né de l’engagement d’Orwell dans la guerre d’Espagne pour laquelle il ne s’était pas trompé quant à la nature du conflit : Franco n’est pas un fasciste, il vise plus à « restaurer le féodalisme » qu’à installer le fascisme. Du côté républicain, ce que va expérimenter Orwell, c’est la division des différents courants qui le constituent, et les manœuvres aberrantes des communistes, avec derrière eux les Soviétiques, qui font la chasse aux anarchistes et surtout aux trotskistes, considérés comme « fascistes ». Cette guerre à l’intérieur de la guerre se traduisit à Barcelone par des combats entre forces de l’ordre obéissant aux communistes et partisans du POUM. Orwell fut écœuré par ces événements et par la manière dont la presse communiste, ou infiltrée par les communistes, rendait compte des événements. C’est à cette époque qu’il devint véritablement anticommuniste.
L’autre grande idée d’Orwell avec celle de la maitrise du passé est celle de la création de la novlangue et son aboutissement la simplification du langage qui conduit à l’appauvrissement des idées. Sur ce point l’anticipation est devenue réalité. C’est ce que nous pouvons constater chaque jour, sans que cela semble émouvoir les populations laborieuses. Mais à la différence de ce qui se passe dans 1984 où les concepts sont exprimés en un minimum de mots annihilant ainsi toute nuance. Le langage actuel est au contraire n’est constitué que par des périphrases profuses qui affaiblissent une idée la noyant et l’édulcorant par un grand nombre de mots qui souvent pourrait être ramenés à un seul, mais cette extension à le même résultat que la réduction orwellienne.
Je crois que l’on pourrait oser le mot plagiât à propos de 1984 par rapport à « Nous autres », du moins jusqu’à la moitié de ce dernier. Ensuite le russe est encombré par sa quincaillerie futuriste et n’est pas capable de nous faire voir un futur cohérent. Par le subterfuge assez grossier il entretient le flou sur le monde qu’il a imaginé à grand coup de descriptions oniriques, ce qui rappelle ce qu’il y a de moins bon dans certains textes de Ray Bradbury. Cette avalanche d’images floues ne fait que dissoudre les intentions critique de Zamiatine. Peu à peu le livre se délite et sa lecture devient ennuyeuse. Aujourd’hui « Nous autres » n’est guère plus qu’une curiosité littéraire et serait totalement oublié sans « 1984 ». Il faut toutefois rappeler que l’auteur russe en 1920 avait très peu à sa disposition de romans décrivant une société située dans un futur lointain. Orwell a donc grandement amélioré « le modèle » par rapport à Zamiatine et sans conteste l’anglais est meilleur écrivain que le russe. Je suis en total désaccord avec se qu’écrit Kundera à propos de « 1984 »: << Roman? Une pensée politique déguisée en roman (…) Les situations et les personnages y sont d’une platitude d’affiche.>>. Si « 1984 » a franchit les année c’est qu’au contraire le personnage de Winston Smith, dont nous découvrons l’histoire progressivement, ses rêves le ramènent à son enfance, existe puissamment et fait que jusqu’à la dernière page le lecteur espère qu’il sera sauvé ou que du moins le couperet tombera le plus tard possible. Winston Smith n’est pas un archétype. Il possède une vrai singularité. D’ailleurs serait-il un résistant crédible à Big Brother s’il n’était pas singulier puisque c’est en se réappropriont sa singularité irréductible qu’il parvient à résister. La première résistance chez Winston Smith c’est d’aimer Julia et quoi de plus singulier que l’amour entre deux êtres. En revanche on peut considérer O Brien comme un archétype du commissaire politique et Julia comme celui de la femme fatale.
« 1984 » est précieux parce qu’il illustre clairement une idée fausse et perverse que sous un régime totalitaire la liberté de penser pourrait demeurer si elle-ci n’est pas traduite en acte parole ou écrit. Ainsi Sartre peut écrire sans honte fin 1944: << Jamais nous n’avons été aussi libre que sous l’occupation allemande.>>. Dans le même temps Orwell écrit dans un article de presse: << La liberté secrète dont vous pouvez prétendument jouir sous un gouvernement despotique est absurde, car vos pensées ne sont jamais entièrement les vôtres. Les philosophes, les écrivains, les artistes, même les scientifiques ont non seulement besoin d’une stimulation constante de la part des autres. Il est presque impossible de penser sans parler. Si Daniel Defoe avait vraiment vécu sur une ile déserte, il n’aurait pas pu écrire Robinson Crusoé, et n’aurait pas voulu le faire.>>.
Il est dommage, mais en même temps pas surprenant, car c’est le concept le plus facile à appréhender, que le grand public, ait retenu de « 1984 », sans la plupart du temps avoir lu le livre, la surveillance continuelle de chaque individu par le pouvoir (idée déjà illustrée par Swift) et cela par écrans interposés; on comprend que cela parle à tous aujourd’hui, plutôt que la manipulation de l’Histoire, donc du temps. Le grand message d’Orwell est que celui qui maitrise le passé donc l’Histoire, sera maitre de l’avenir. N’est-ce là de nos jours un danger encore plus grand que la surveillance généralisée quand on voit que chaque jour sous la pression de la cancel culture qui se donne pour projet de purger les l’Histoire et même les arts de tout se qui offense ainsi le passé est réécrit selon les dogmes du présent! Elle est là l’actualité d’Orwell!
C’est bien sûr « 1984 » qu’il faut lire aujourd’hui sans oublier toutefois ce que le roman doit à Zamiatine et à quelques autres y compris aux autres oeuvres d’Orwell que sont « La ferme des animaux » et « Un peu d’air frais ».
Paul Jacoulet au musée du quai Branly
.
Le, alors très jeune Paul Jacoulet travaillant sur le motif
.
Pour une fois, enfin presque, poussons nous du col, en effet avant cette exposition, ils étaient bien peu nombreux les blogs français qui parlaient de Paul Jacoulet sinon le mien. Pour en connaitre plus et voir d'autres merveilles de cet artiste allez donc voir le billet que je lui ai consacré: Paul Jacoulet
Je ne parlerais donc cette fois que de l'exposition qui lui est dédiée au musée du quai Branly dont il faut encourager l'audace et la qualité des expositions.
Le lieu oblige l'accent est mis sur le coté ethnologique, dans l'exposition et encore plus dans le catalogue, du travail de Jacoulet et en particulier sur ses réalisations ayant trait à la Micronésie.
En 1929, un jour de grande pluie un adolescent offre à Paul Jacoulet un coin de parapluie le bel adolescent aux yeux sombres se nomme Enis; il lui dit venir de la mystérieuse "Truk", une île de Micronésie. Le père du garçon, Pierre Nedelec, est un Français qui, après avoir servi dans la marine, s'y est établi et y a épousé "une beauté locale" : Enis est le fruit de cette union. Paul Jacoulet le prend sous son aile... et c'est à l'invitation de Pierre que l'artiste découvre ce qu'il appelle plus volontiers "les mers du Sud". Ce sont surtout les portraits que Jacoulet a fait dans ces iles de la mer du sud que l'on voit majoritairement quai Branly.
L'exposition est présentée d'ailleurs géographiquement, selon les lieux auxquels se rapportent les oeuvres et non d'une manière chronologique, ce qui est judicieux car l'art de Jacoulet a peu évolué au fil du temps.
Le très copieux accrochage présente deux sortes d'oeuvres (180), d'une part les dessins aquarellés et d'autres part les estampes, ou plus exactement des Ukiyo-e. Souvent les dessins sont les originaux des estampes. Dans quelques cas l'exposition confronte l'estampe avec le dessin qui en est la base. Le mode opératoire pour obtenir un ukiyo-e à partir d'un dessin est bien expliqué. On s'aperçoit que le graveur puis l'imprimeur est presque aussi important que le dessinateur, d'ailleurs chaque feuille obtenue comporte trois signatures, celle du dessinateur, celle du graveur et celle de l'imprimeur.
Paul Jacoulet dans son atelier en 1923
L'angle ethonologique pris par l'exposition laisse un peu dans l'ombre la personnalité extraordinaire de Jacoulet qui il faut le dire s'est ingénié à brouiller les pistes et a laisser sa vie privée et même l'itinéraire de ses voyages dans le plus grand flou. Il reste encore beaucoup de zones d'ombre sur ce personnage après cette exposition pourtant très complète. Quels étaient ses relations exactes avec ses nombreux jeunes "amis"? Comment a-t-il échappé à la conscription durant la guerre de 14 (probablement en mentant sur son âge). Quels étaient ses opinions sur le régime militaire du Japon dans les années trente, régime qui surveillait cet étranger anticonformiste. Quel a été sa situation à partir de 1943? était-il en résidence surveillée? Comment a-t-il pu bénéficié après le guerre de l'aide de l'armée américaine qui lui a quasiment organisé des expositions... Enfin rien nous est dit sur les tirages des différentes estampes (pour celles passées en vente il serait de 150 exemplaires numérotés).
Le magnifique catalogue (49 € tout de même) répond à beaucoup d'autres questions que je me posais sur cet extraordinaire artiste. En outre il donne beaucoup d'informations sur la vie dans les iles du Pacifique dans l'entre deux guerre.
Les photos sont autorisées mais comme tout est sous verre il est très difficile d'échapper aux reflet et aux spots d'éclairage; peut être avec un filtre anti reflet mais je n'en avais pas lors de ma visite...
Une exposition passionnante et merveilleuse à voir et à revoir. Est ce qu'un lecteur pourrais me dire où l'on peut voir des ukiyo-e et surtout des originaux de Jacoulet au Japon (et ailleurs).
.
.
Paris, mars 2013
Pour retrouver Jacoulet sur le blog:
Bernard13/04/2015 22:23
lesdiagonalesdutemps17/04/2015 08:11
Tom Peeping24/03/2013 08:33
lesdiagonalesdutemps24/03/2013 10:02
xristophe09/03/2013 02:53
lesdiagonalesdutemps09/03/2013 06:42
JACK05/03/2013 22:55
lesdiagonalesdutemps06/03/2013 02:20
JACK05/03/2013 01:59
lesdiagonalesdutemps05/03/2013 07:15