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Dans les diagonales du temps
1 mai 2021

Marquet au Musée de la Marine

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Si comme moi vous êtes à Paris comme un orphelin de la mer, une seule adresse dans la capitale pour vous rasséréner, le musée de la marine. L’adresse est encore plus à conseiller qu’à l’habitude puisqu’il s’y déroule une exposition Marquet (1875-1947) que l’on attendait depuis trop longtemps dans ce lieu ou dans un autre. Marquet, est le peintre paysagiste français majeur du XX ème siècle (il a également réalisé quelques beaux nus féminin. Il a connu une grande notoriété de son vivant a été ensuite un peu marginalisé dans l’histoire de l’art moderne. Le purgatoire de ce très grand peintre a deux causes, à commencer par sa peinture qui semble facile, pouvant être appréciée par le plus grand nombre, quelle horreur pour le microcosme du milieu de l’art. La seconde raison de son relatif effacement tient à la personnalité du peintre, homme timide qui n’a jamais défrayé la chronique sinon lor¡s des vernissages de ses expositions. Les voyages ont été sa manière de fuir les mondanités. Ce natif de Bordeaux choisissait pour ses nombreuses escapades presque toujours les bords de mer. Il y a peu de Marquet sans eau, si la mer est loin, il peint le fleuve (mais vous ne verrez pas ici ces tableaux). Je suis sûr que de nombreux lycéens se souviennent de cette mélancolique vue de la Seine qui était en couverture du Lagarde et Michard du XX ème siècle, et bien elle était signée Marquet... Sa timidité se lit dans sa position vis à vis des paysages, l’ essentiel de son œuvre. Le peintre se place presque toujours hors des lieux qu’il peint. Ceux-ci sont presque toujours regardés d’une fenêtre en surplomb, en retrait, à l’ abri. Les tableaux de Marquet sont essentiellement des vues en plongée. Marcelle Marquet, son épouse, qui consacra un livre à son mari, peu après la mort de l’artiste, résume bien sa position tant par rapport au motif que vis à viÓs de la société: << Marquet ne se perchait jamais sur un piedestal, il ne prenait pas de longue vue et s’il regardait d’un peu haut ce n’était point pour se séparer mais pour voir ce qui l’intéressait lié à l’ensemble dont il faisait partie. Il ne pensait pas à se ranger à part, ne s’étant jamais mis en tête d’avoir qualité pour juger.>>. Comme il se doit au musée de la marine nous sont présenté que les tableaux marins du peintre qui, chez cet amoureux de la mer, qui était, comme Marin-Marie par exemple, peintre officiel de la marine, représente la majorité de son œuvre. La peinture de Marquet est à la fois virtuose et modeste. Peintre aussi pour peintre, les professionnels ne s’y trompent pas. Marquet a été un des peintres les plus imités et l’on ne peut que constater que ces ersatz sont bien piteux. Ce qui prouve le talent de Marquet. Sa palette est rarement flamboyante, à l’éblouissement Marquet préfère les camaïeux de tons subtils et sourds. Il Choisit une couleur dominante par toile. Lorsque l’on observe les marines de Marquet, bien que peintre de la marine, ces tableaux ne sont pas des portraits de navires comme chez Brenet par exemple, mais de simples éléments qui, comme les silhouettes des hommes qui traversent le panorama, construisent et structurent la toile. La grande force de Marquet est son talent de synthétiser un paysage, d’en faire sortir le suc essentiel, de réussir à rendre le bouillonnement d’activité qu’il a devant les yeux en quelques masses simples qui ne sont jamais anecdotiques mais font entrer ce coin de France ou d’ailleurs dans une sorte d’éternité iconique. Il va a l’essentiel, il simplifie, il élague, cette concision ne nuit pourtant pas à l’exactitude descriptive, sa pâte est lisse et couvre bien la toile. Son cadrage est influencé par la photographie. Il organise ses toiles avec des avants plans et des arrières plans. Même pour les bons connaisseurs de Marquet l’exposition sera une découverte, celle des dessins, rarement vécus par l’artiste comme oeuvres à part entière, mais comme notes préparatoires pour de futurs compositions. Dans ces petits morceaux de papier éclatent le talent de l’artiste, le tracé d’ une ligne sans relevé son crayon lui suffit pour évoquer un croiseur. A propos du dessin de son ami, Matisse déclarait: << Lorsque je vois Hokusai, je pense à notre Marquet - et vice versa -, je n’entend pas imitation d’Hokusai mais similitude.>>. Ils seront aussi surpris par certains tableaux du milieu des années trente aux couleurs acidulées et vives qui chantent comme dans des Dufy et qui mettent un peu à mal la réputation de peintre des gris de Marquet. Son ami Matisse disait que si Il peignait dans les gris c’est qu’à ses débuts, il y avait été obligé, par manque de moyens pour s’acheter des couleurs. Enfin c’est une vraie curiosité qui accueille le visiteur, un mur de carelage, conçu par Marquet selon la technique des Azulejos pour décorer sa salle de bain parisienne, chaque carreau, peint par l’artiste, qui cette fois s’est fait décorateur, évoque un de ses lieux de prédilection. Cet accrochage est une constante invitation au voyage. Je n’avais pas repensé depuis presque quarante ans à la plage de La Goulette et en sortant j’ai eu grande envie de la revoir. La présentation est géographique. On s’aperçoit qu’aucune côte française n’est étrangère à Marquet, même si il a quelques lieux de prédilection. Mais il a poussée sa curiosité des grèves bien au delà de nos frontières. Il a visité l’Italie, l’Espagne, beaucoup l’Afrique du nord et aussi la Hollande, les côtes allemandes et même les plages scandinaves. L’exposition est roborative, 77 peintures, 33 aquarelles et 30 dessins ont été sélectionnés, complétés par des lithographies qui révèlent un Marquet peu connu : illustrateur d’ouvrages, dont ceux signés par son épouse, née Marcelle Martinet, mais pas étouffante. Chaque toile, qui n’est pas accrochée trop haute, c’est bien, est commentée clairement dans un petit cartouche. Elle est aussi située sur une carte des côtes d’Europe. Lorsque Marquet a peint plusieurs fois le même site, ce qui est fréquent, toutes les t≥oiles le représentant sont montrées sur le même mur. Ce qui permet de constater les changements dans la manière ( Il vient du fauvisme un fauve apprivoisé). Si ceux-ci ne sont pas radicaux, ils montrent un constant souci du peintre d’être de plus en plus simple, de rendre le paysage avec un minimum de moyen et le miracle avec Marquet s’est qu’il nous transporte instantanément sur la grève qu’il a portraiturée et pourtant nous somme très loin de tout réalisme photographique. Mais si Marquet comme Monet, ce n’est pas comme chez ce dernier pour fixer des lumières toujours changeantes mais pour approfondir le thème. Avec Marquet nous sommes dans une peinture sérieuse qui sait instiller la joie chez le spectateur. Le cabotage place du Trocadéro est chaudement conseillé et il vous donnera de belles idées pour vos prochaines vacances.

 

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Paris, novembre 2008

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